Quatre romans, deux récits dont un graphique, deux essais biographiques, un d’histoire, un de féminisme, une étude littéraire… Voici les brèves critiques de onze ouvrages notables en cette quarante-quatrième semaine de l’année.
Dans ce nouveau roman de Metin Arditi, suite du Danseur oriental, paru au printemps (Grasset), on retrouve Gülgül, champion de lutte promu héros national avant de devenir une cible politique et d’être contraint à l’exil. Pour servir son protecteur, Kemal Atatürk, il intègre un institut lausannois, où il s’informe en sous-main sur les stratégies nazie et fasciste à l’œuvre. Même si « l’exil, quelquefois amer, pouvait en même temps avoir le goût du miel, comme certaines confitures à la cuillère qui étaient douces et amères à la fois », la posture de l’espion se révèle périlleuse. Comme celle de ses proches, restés à Istanbul, où pogroms et lois iniques provoquent des drames en série. Sur deux décennies, oscillant entre espoir et angoisse, Gülgül vit à l’image de sa ville, insaisissable, « tout entière en collines. Des hauts et des bas. La vraie vie, entre plaisir et chagrin ». Mais il lui reste la parade suprême : « Il n’y a rien dans une vie, aucun bonheur, aucun malheur, qui ne puisse être dansé. » Ph.-J. C.
A l’occasion de la préparation du documentaire Les Fantômes de l’hystérie. Histoire d’une parole confisquée, diffusé en 2023 sur France Culture, Pauline Chanu constate que l’hystérie n’a rien d’un diagnostic obsolète ou d’une « fiction du passé ». Elle décide alors de traquer l’hystérie là où elle survit encore : dans les cabinets des médecins et des psychanalystes, les hôpitaux, les commissariats et les tribunaux ; mais aussi, bien sûr, dans nos imaginaires. Pourtant supprimée des classifications psychiatriques, l’hystérie des femmes victimes reste en effet systématiquement invoquée par la défense des agresseurs dans les affaires de violences conjugales.