Le pacte Dutreil, la niche fiscale préférée des patrons, va sans doute sortir légèrement raboté de la discussion budgétaire, de façon à en limiter les abus les plus criants. Pas question en revanche de remettre en cause l’essentiel de ce dispositif, pourtant jugé à la fois très coûteux, « trop large », « insuffisamment ciblé » et d’une « faible efficience économique » par la Cour des comptes. C’est ce qui ressort des débats qui se sont tenus, lundi 3 novembre, à l’Assemblée nationale, durant lesquels ont été adoptés plusieurs amendements sensibles. Le plus marquant exclut du bénéfice du « Dutreil » les biens non-professionnels.
Pour les élus, il devenait difficile de continuer à ne rien faire. Le pacte Dutreil, un des principaux dispositifs français permettant d’échapper à la fiscalité sur les successions, est la cible de critiques depuis des années. Mais jusqu’à présent, ses défenseurs pouvaient s’appuyer à la fois sur l’absence d’études remettant en cause son intérêt, et sur un coût apparemment limité : Bercy a longtemps prétendu qu’il entraînait un manque à gagner fiscal de seulement 500 millions d’euros par an, avant de le rehausser à 800 millions en 2024.
Or, dans un rapport explosif dont Le Monde a dévoilé l’essentiel en octobre, la Cour des comptes a fait voler tout cela en éclats. Le coût ? Il s’est envolé ces dernières années, passant de 1,2 milliard d’euros en 2020 à plus de 5,5 milliards en 2024, a-t-elle révélé. Très loin donc des 800 millions officiels, qui ressemblent fort à un mensonge d’Etat. L’efficacité ? Pour le moins limitée au regard de cette charge pour les comptes publics.
Le pacte Dutreil a été conçu pour éviter que les héritiers d’un chef d’entreprise ne soient contraints, pour payer les droits de succession, de vendre la société ou d’assécher ses finances en ponctionnant d’énormes dividendes. Mais, si le système entraîne un effet « légèrement positif » sur la pérennité de ces entreprises, cela ne se traduit pas ensuite par une hausse de l’investissement et de l’emploi, constate la Cour des comptes.