Une enquête parlementaire au Kenya, publiée mardi 2 décembre, dénonce une « tendance inquiétante d’inconduite sexuelle » d’une unité de l’armée britannique basée dans le pays d’Afrique de l’Est. Depuis l’indépendance du Kenya, en 1963, l’ancienne puissance coloniale britannique y conserve une base, l’Unité de formation de l’armée britannique au Kenya (Batuk), dans les faubourgs de Nanyuki, à environ 200 kilomètres au nord de la capitale Nairobi. Sa présence alimente l’économie locale, mais a également été source de controverses.
L’enquête du comité parlementaire de la défense a « révélé une tendance inquiétante d’inconduite sexuelle de la part du personnel de la Batuk, marquée par des viols, des agressions et l’abandon d’enfants conçus par des soldats. »
« Les survivantes de violences sexuelles ont signalé que des affaires ont été abandonnées ou mal traitées par les autorités locales, de nombreuses victimes se voyant refuser l’accès à la justice », ajoutent les députés, assurant se fonder sur de nombreux témoignages oraux et écrits de victimes, d’ONG et de responsables locaux notamment, reçus au cours de plus d’un an d’audiences.
Daté du 25 novembre, le rapport d’enquête est publié presque un mois après l’arrestation au Royaume-Uni de Robert James Purkiss, un soldat britannique accusé du meurtre en 2012, à Nanyuki, d’Agnes Wanjiru, jeune mère kényane de 21 ans, une affaire restée des années en suspens et source de tensions diplomatiques entre Londres et Nairobi.
Visé depuis septembre par un mandat d’arrêt de la justice kényane, l’homme de 38 ans a été arrêté le 6 novembre et a comparu le lendemain devant un tribunal britannique, déclarant s’opposer à son extradition vers le Kenya qui le réclame. Le juge l’a maintenu en détention provisoire.
Le corps d’Agnès Wanjiru avait été retrouvé dissimulé dans la fosse septique d’un hôtel de Nanyuki. Selon l’avocat de James Purkiss, l’ex-soldat « nie avec véhémence » être le meurtrier de la jeune femme.
L’enquête parlementaire révèle aussi des « schémas constants de négligence grave de la part de la Batuk dans la gestion des munitions non explosées, entraînant de multiples blessures et décès de civils » kényans. Elle dénonce aussi d’importants dégâts environnementaux et un partage insuffisant d’informations de la Batuk avec les communautés locales, notamment l’absence de communications en matière de risques, ayant entraîné des « chocs, des blessures et des traumatismes lors d’exercices » militaires.
En conséquence, « la Batuk est de plus en plus perçue comme une présence occupante plutôt que comme un partenaire de développement, les habitants touchés établissant des parallèles avec les injustices coloniales », notent les députés. En 2003, l’ONG Amnesty International affirmait avoir répertorié 650 accusations de viol contre des soldats britanniques au Kenya entre 1965 et 2001, dénonçant des « décennies d’impunité ».