La revue des revues. Parce que la dénonciation du « gouvernement » des juges est devenue, en Europe, l’un des refrains des mouvements populistes, la revue trimestrielle de l’Ecole nationale de la magistrature consacre le dernier numéro de l’année 2025 à l’Etat de droit. Violemment attaqué par les tenants de l’illibéralisme, il ne constitue en rien un détail démocratique, rappelle, dans son éditorial, le directeur scientifique des Cahiers de la justice, le magistrat et essayiste Denis Salas : l’Etat de droit est au cœur du « récit fondateur de notre Constitution mais aussi de l’Europe et des Nations unies depuis 1945 ».

Pour mieux cerner cette notion de plus en plus contestée à l’extrême droite, le philosophe Bruno Bernardi retrace, dans ce dossier, l’histoire « conceptuelle » du « Rechtsstaat » allemand, de la « rule of law » anglaise et de l’Etat de droit français depuis l’émergence de leurs premiers jalons symboliques – la Magna Carta (1215), la Petition of Right (1628), l’Habeas Corpus Act (1679) ou le Bill of Rights (1689). « Le XXe siècle, écrit-il, a mis en évidence la double impossibilité de penser la démocratie sans l’Etat de droit comme régulation du pouvoir politique et l’Etat de droit sans la démocratie comme source du droit positif. »

Dans une contribution consacrée à la Cour européenne des droits de l’homme, le juriste Mustapha Afroukh réfute, de son côté, l’idée, défendue par l’ancien ministre de l’intérieur Bruno Retailleau, que les juges de Strasbourg incarnent un « impossibilisme juridique » contraire au principe de la souveraineté du peuple. Ce « non-sens », écrit le professeur de droit, ignore que « l’intérêt général, la démocratie politique et le rôle des législateurs nationaux sont omniprésents dans la jurisprudence européenne ». S’appuyant sur de nombreux arrêts, Mustapha Afroukh montre ainsi que le contrôle juridictionnel de la Cour est, contrairement à ce qu’affirment ses détracteurs, respectueux du rôle des autorités politiques nationales.

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