Il n’a plus rien à prouver. Même dans la panade, réduit au régime bouillon et pain sec à la dérive, le bol à soupe inspire l’adhésion et une confiance immédiates. Les mains viennent instinctivement épouser sa rondeur, leurs paumes bien calées contre ses flancs. Mais le bol de soupe est plus qu’une simple parenthèse réconfortante. Il nourrit. Et cette mission est décisive.

« Car la soupe ne se boit pas, elle se mange. Elle peut donc se permettre d’être brûlante », explique Antoine Béchu-Pochez, à la tête de la manufacture drômoise de porcelaine Revol. La cuillère prélève, puis laisse au liquide le temps de perdre quelques degrés avant d’atteindre la bouche. Le bol est pensé pour accompagner ce geste. « A lui de maintenir la chaleur, de concentrer les saveurs et de contenir les morceaux en mouvement, sans éclaboussures. »

Cette exigence thermique et acrobatique dicte la taille de son ouverture : trop large, la soupe refroidirait trop vite, trop étroite, elle deviendrait inconfortable à servir et à manger. « Là où les bols à cappuccino ou à matcha s’évasent pour offrir un terrain d’expression aux baristas et à leurs dessins en mousse de lait, le bol à soupe doit être enveloppant et son encolure contenue. » Son diamètre se situe dans cet entre-deux.

« Chez Revol, le bol à soupe idéal est de 15,5?centimètres de diamètre et d’une contenance de 70?centilitres, un format privilégié en Corée pour les recettes de bouillon avec des nouilles, continue Antoine Béchu-Porchez. Avec 5?centimètres de moins, c’est un bol à riz. » Le compagnon du minestrone, de la bisque, du phô ou de la harira a bien tenté de céder à l’air du temps en s’aventurant dans des formats carrés. Moins convaincants à l’usage. La cuillère y heurte les angles et la dégustation perd de son charme. Mais s’il s’en tient à l’arrondi, le bol à soupe tolère toutes les matières et tous les écarts d’usage.

En porcelaine, décoré de deux ailettes ou de têtes de lion pour le tenir, il transporte la soupe à l’oignon gratinée qui sort du four. Lisse, en métal émaillé, large de 12?centimètres chez Falcon, il se remplit de gaspacho, potage froid, soupe de fruits rouges et peut même accueillir un poke bowl, un crumble tiède ou du taboulé. Le bol à soupe s’adapte. Aussi à l’aise en randonnée que dans un restaurant étoilé, cette force tranquille ne réclame aucune table et se contente d’un rebord, d’un muret, parfois même de rien s’il peut se caler contre une paume de main.

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