Bernard Duterme, essayiste : « Le tourisme, de masse ou de niche, sature ou exclut »

Le monde est à disposition. Plus que jamais. A disposition touristico-consumériste de cette part minoritaire de l’humanité – entre 6 % et 9 % de la population mondiale – outillée financièrement, culturellement et politiquement pour le visiter. Ou plutôt pour y prendre « ses vacances », ces moments de prélassement ou de divertissement « bien mérités », à raison d’une, deux, trois fois ou plus encore par an.

Jamais dans l’histoire, autant de séjours de plaisance à l’étranger n’auront été enregistrés en douze mois. Jamais dans l’histoire, la dynamique n’aura brassé autant d’argent qu’en 2025, ni produit autant de recettes. Les communiqués euphoriques de l’ONU Tourisme ou du World Travel & Tourism Council (WTTC), l’organisme de référence qui fédère plus de 200 des principaux méga-tour-opérateurs privés, sont sans équivoque.

L’avenir est prometteur : le secteur a injecté cette année près de 12 000 milliards de dollars [10 193 milliards d’euros] dans l’économie mondiale, plus de 10 % du produit intérieur brut (PIB) mondial. C’est quelque 1 000 milliards de plus qu’en 2024 et environ 1 500 milliards de plus que lors du précédent record, prépandémique, de 2019.

Jamais non plus, de par son ampleur, ses moteurs et ses propulseurs, le tourisme international n’aura autant pollué. En dépit du verdissement commercial de son image, la fabrique du dépaysement – la supposée « industrie sans cheminées » – occupe une place de choix parmi les principaux pollueurs. En raison de sa croissance continue bien sûr – nettement plus rapide que celle de l’économie mondiale –, mais aussi du fait de son empreinte environnementale, en hausse elle aussi, forcément. Selon une énième étude sur le sujet, les seules émissions de gaz à effet de serre du secteur accusent un rythme de progression de 3,5 % l’an, c’est-à-dire plus du double que celui de l’ensemble des activités économiques à l’échelle planétaire.

Jamais dans l’histoire donc, le tourisme international n’aura déployé autant ses ailes qu’en 2025, en nombre de vacances prises à l’étranger (environ 1,5 milliard), en valeur ajoutée et en chiffres d’affaires, et partant, en impact sociétal, culturel et socio-environnemental. L’abstinence contrainte de la parenthèse pandémique n’est, enfin, plus qu’un mauvais souvenir. Il aura fallu trois ans pour en sortir. Et relancer la machine de plus belle, « toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus fort » !

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