Alors c’est fini ? Les touristes ne les prendront plus en photo avec leur casquette rose ? Personne ne les applaudira plus quand ils chanteront (faux) Born to be alive en pleine rue ? Les enfants ne se bousculeront plus pour qu’ils leur mettent un coup de maquillage bleu-blanc-rouge sur les joues ? Au milieu de la foule pour la finale de beach-volley, Lola, étudiante, et Thomas, conducteur de travaux (comme la plupart des volontaires cités, ils n’ont pas souhaité donner leur nom), dansent dans le soleil qui se couche au pied de la tour Eiffel. Plus peur de rien, déchaînés, comme si c’était la dernière fois. Et, à vrai dire, c’est la dernière fois, leur danse d’adieu aux Jeux olympiques (JO). Volontaires de la Ville de Paris le temps des JO, leur mission se termine ce week-end. « On a vécu à fond, on est sorti de nous-mêmes, on avait l’impression d’avoir des superpouvoirs », dit Lola. Et Thomas : « On ne le verra peut-être plus jamais, mais ça nous sera arrivé une fois. »
Pour les 5 300 volontaires de Paris, les premiers pas sur le terrain avaient commencé il y a deux semaines, autant dire une éternité. La capitale sursautait encore en entendant les hélicoptères brasser l’air brûlant au-dessus de la Seine et s’exaspérait des détours imposés par les compétitions en ville. Ingénieur dans l’énergie, Guillaume avait postulé comme volontaire « un peu en douce ». Sa compagne, elle, avait en tête de partir en Bretagne, eux deux en télétravail estival, les gamins avec les grands-parents. Guillaume le savait bien. Mais lui, il se voyait au Stade de France, discutant en uniforme de bénévole avec le vainqueur du 100 mètres.
Pendant les quelques réunions préparatoires, des formateurs avaient passé le message : « Vous serez des ambianceurs de la ville, profitez à fond. » Facile à dire. Contrairement aux bénévoles du comité des Jeux olympiques – qui, eux, sont 45 000 –, ceux de la Ville n’assistent pas aux compétitions, aucun contact avec les athlètes, pas d’accès, en général, à l’intérieur des sites. Ils aiguillent les gens à l’extérieur, occupent l’attente. Beaucoup ne l’avaient pas compris. Le premier jour leur paraît interminable, à piétiner gauchement au milieu des files. Ils risquent des « bonjour ». Peu de réponses. « Le premier jour, on a tous tâtonné », raconte Julie Hervieu, responsable de Paris-Centre pour la Mairie.
En uniforme vert et rose, Guillaume se retrouve au bas des Champs-Elysées, à photographier les touristes dans un cadre en trompe-l’œil, siglé Jeux olympiques 2024. Personne ne l’imaginerait faire ça, pas même lui. Dans la vie, Guillaume manage une cinquantaine de personnes, sa famille vit dans un quartier plaisant choisi pour l’école des enfants, leurs amis sont cadres comme eux. Certains vont ricaner. Guillaume les entend déjà. « Franchement, au début, j’ai pas trouvé ça très sexy », se souvient un autre volontaire, commercial chez Darty.