Quand la start-up européenne Helsing, spécialiste de l’intelligence artificielle (IA) embarquée sur les équipements militaires, s’est lancée en 2021 grâce à une mise de fonds de 100 millions d’euros du fondateur de Spotify, Daniel Ek, ses dirigeants n’escomptaient sans doute pas un développement aussi rapide. La guerre en Ukraine a changé la donne pour la jeune entreprise qui travaille depuis deux ans pour les forces armées de Kiev, a dévoilé, lundi 2 décembre, une « étape majeure de sa mission de renforcer la sécurité des démocraties » : un drone de frappe « intelligent » et produit en masse, élément décisif dans les conflits de haute intensité où l’attrition des matériels est considérable.
Le quotidien allemand Bild avait révélé l’information, mi-novembre, en titrant « 4 000 drones tueurs allemands contre Poutine ». On reprochait alors au chancelier Olaf Scholz de refuser la livraison de missiles à longue portée Taurus qui auraient permis aux Ukrainiens de frapper dans la profondeur du territoire russe. La livraison de ces drones dénommés « HX-2 » ne sont pas des « mini-Taurus », a alors précisé le ministre de la défense, Boris Pistorius, mais quand même « un atout supplémentaire important pour les forces armées ukrainiennes », a débuté et s’étalera jusqu’au printemps 2025 – une aide cruciale au moment où les Ukrainiens peinent à contenir les Russes dans le Donbass.
Cette « munition d’une extrême précision » a une portée maximale de 100 kilomètres, précise Antoine de Braquilanges, le directeur général d’Helsing France. Avec l’appui d’un drone de reconnaissance capable d’identifier les cibles (poste de commandement, nœud logistique, blindé…), sa principale force est de pouvoir opérer même en cas de brouillage des signaux, utilisé de façon systématique en Ukraine, et d’évoluer dans des espaces sans communication grâce à son logiciel d’IA.
Longtemps discrets sur la présence d’Helsing en Ukraine, aujourd’hui officielle, ses dirigeants expliquent que les capacités du HX-2 ont été « développées et testées grâce à [son] expérience » sur ce théâtre d’opérations. Il s’agit d’équipements soumis à « des cycles d’innovation très courts, de trois à quatre semaines », souligne Marc Fontaine, ancien responsable du déploiement numérique chez Airbus et président de la filiale française.
En outre, le vecteur et le logiciel embarqué ont été conçus pour être fabriqués en grande quantité, sur le sol ukrainien et dans d’autres pays européens. « Notre ambition est d’en produire jusqu’à plusieurs milliers par mois », indique M. de Braquilanges, qui se félicite d’un nouveau paradigme qui n’oppose plus haute technologie et production de masse. S’il se refuse à en divulguer le prix précis, il vise un coût inférieur à son équivalent, le redoutable Lancet russe.