La nécessité de renouveler les relations entre la France et l’Afrique ne lui avait pourtant pas échappé. « Il n’y a plus de politique africaine de la France ! », s’était exclamé Emmanuel Macron à l’université de Ouagadougou, au Burkina Faso, en novembre 2017, six mois après son élection à la présidence de la République. Depuis le pays de Thomas Sankara, président révolutionnaire au pouvoir de 1983 à 1987 et symbole de la résistance au néocolonialisme en Afrique, le président de la République avait promis un « changement profond » et la fin des « faux discours dans lesquels nous nous étions parfois enfermés ».
Ses prédécesseurs François Hollande et Nicolas Sarkozy avaient déjà promis, avant lui, une refondation des relations franco-africaines. Mais cette fois, l’espoir suscité était encore plus grand. Le profil atypique du plus jeune président de la Ve République – s’affichant en rupture avec les partis traditionnels et la classe politique française liée aux méandres de la « Françafrique » – séduisait alors une jeunesse africaine aux aspirations souverainistes et qui ne se reconnaissait pas dans ses vieux dirigeants. « Je suis, comme vous, d’une génération qui n’a jamais connu l’Afrique comme un continent colonisé », avait insisté le chef de l’Etat sous les applaudissements des étudiants burkinabés.
En affichant sa proximité avec les peuples plutôt qu’avec leurs présidents – comme lors du sommet Afrique-France de Montpellier, en octobre 2021, auquel ont uniquement été conviées les sociétés civiles africaines –, Emmanuel Macron « a insufflé l’idée d’un nouveau monde, mais sans le concrétiser », analyse l’économiste Kako Nubukpo. Pour l’ancien ministre togolais, la diplomatie africaine du président « a souffert d’une forme de contradiction entre le discours et la pratique, qui l’a rendue illisible pour les Africains ». « Il n’a pas réussi à sortir du paradoxe français issu des indépendances et qui a toujours consisté à dire : “On part, mais sans partir ; on change, mais sans changer” », ajoute-t-il.