A Versailles, Jacquemus met en scène ses rêves d’enfant

Pendant des années, Jacquemus a tenu à se démarquer. Plutôt que de défiler en même temps que ses concurrents, il a organisé des événements hors calendrier, loin de Paris : dans la villa Malaparte, à Capri (Italie), à la Fondation Maeght, à Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes) , sur une plage d’Hawaï (Etats-Unis)… Mais, depuis deux saisons, le styliste provençal, qui ambitionne de rendre sa maison plus luxueuse, est rentré dans le rang. Son défilé, présenté le 29 juin, est le dernier de la fashion week masculine printemps-été 2026. Et il a lieu à Paris, ou presque.

Jacquemus retourne au château de Versailles, où il avait déjà défilé il y a deux ans, le long du grand canal. Cette fois-ci, il s’installe dans la majestueuse galerie de l’Orangerie, longue de plus de 150 mètres, dont la voûte culmine à 13 mètres. Jacquemus ayant déjà été mécène du château, et s’apprêtant à financer une nouvelle rénovation, le choix de Versailles paraît logique. Il devient plus surprenant quand on sait que la collection s’appelle « Le Paysan » – un hommage à ses grands-parents qui travaillaient dans les champs.

« Et pourquoi pas “Le Paysan” à Versailles ? La Révolution est déjà passée par là ! », botte en touche Simon Porte Jacquemus. Ce dernier affirme que cette collection, qui met en scène son rêve d’enfant de devenir créateur de mode, a sa place dans un lieu de rêve comme celui-ci. « La collection est très autobiographique. Elle raconte mon enfance, la liberté que m’a laissée ma famille de faire ce que je voulais. J’ai la chance d’avoir encore tous mes grands-parents, c’était le moment de les remercier » – et de les inviter au défilé.

Cette collection, qui présente quelques silhouettes masculines et beaucoup de féminines, fourmille d’allusions au passé du natif de Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône). A l’instar d’une robe bustier en lin grège, joliment drapée autour du corps : une référence à sa première création, une jupe taillée dans un rideau de lin quand il avait 8 ans. Les tabliers, les châles, les fichus et les jupons évoquent une Provence d’antan ; mais la sophistication des coupes et le jeu de volumes lui donnent une dimension couture très moderne.

Les looks frappent par la géométrie des formes : une petite veste drapée aux manches amples et pointues évoque un calisson ; un trench composé de dizaines de mètres de tissu se déploie en volutes gracieuses autour du corps ; des pampilles donnent de la structure à une jupe trapèze. Les dos surprennent, avec des robes lacées nouées dans les cheveux, des traînes invisibles à l’avant, des jeux sur les longueurs. La palette chromatique noir, blanc et pastel souligne la pureté des lignes. Les hommes sont plus sobres, mais pas moins élégants avec leurs costumes à la fois souples et larges dans la lignée de ceux de Giorgio Armani. La dernière collection était déjà empreinte d’élégance, mais, cette fois, elle possède aussi l’ADN provençal de Jacquemus, ce qui la rend singulière. Et très réussie.

En 2025, Jacquemus a ouvert son capital à un investisseur (L’Oréal, à hauteur de 10 %) et s’est doté d’une directrice générale (Sarah Benady). La PME de Simon Porte Jacquemus se structure et vise une nouvelle clientèle : « Avant, c’était une jeune fille qui venait acheter son premier sac ou un bob. Maintenant, c’est plutôt la mère », explique le créateur, qui dit vouloir « mettre la mode au centre de son travail ». En même temps qu’il propose des vêtements plus luxueux et épurés, Simon Porte Jacquemus ferme ses points de vente dans les centres commerciaux pour développer son propre réseau de boutiques. « Pour faire de la marque un bijou », dit-il. Conformément à ses rêves d’enfant.

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