Migration transmanche : un accord politique entre la France et le Royaume-Uni

L’accord sur la migration transmanche présenté jeudi 10 juillet par Emmanuel Macron et le premier ministre britannique, Keir Starmer, à l’issue de la visite d’Etat du président de la République au Royaume-Uni, traduit la volonté des deux gouvernements de tester une solution à ce problème qui empoisonne leurs relations, cause la mort de dizaines de personnes noyées dans la Manche chaque année et a fait émerger un ignoble trafic humain dans les campements insalubres de candidats au départ sur les rivages français.

Il s’agit, ont précisé les deux dirigeants, d’un « projet pilote » qui ne portera au début que sur un petit nombre de migrants. Baptisé « un dedans, un dehors » par les médias britanniques, il prévoit le renvoi en France des personnes arrivées illégalement en Grande-Bretagne à bord des small boats fournis par les passeurs et déboutées du droit d’asile, en échange de l’acceptation par Londres des candidats au regroupement familial et de ceux dont le statut de réfugié ne fait pas de doute. Pour chaque personne renvoyée en France, une autre sera admise en Grande-Bretagne.

Le Royaume-Uni ouvre ainsi une voie légale d’immigration, ce qu’il refusait de faire jusqu’à présent. La France accepte de reprendre des migrants de small boats, ce qu’elle refusait de son côté.

Cet accord ne prétend pas régler la douloureuse question de la gestion des départs de migrants illégaux vers la Grande-Bretagne, en forte progression en 2025, mais ses artisans espèrent qu’il constituera l’amorce d’une solution. Flou à la fois sur son calendrier et sur son ampleur, il a l’avantage de mettre en place une voie sûre pour demander l’asile, ce qui devrait dissuader les candidats de prendre la mer. C’est une nouveauté. C’est un petit pas, une avancée mutuelle très mesurée, mais qui a le mérite d’exister.

La France obtient aussi une rallonge – dont le montant est à ce stade inconnu – aux 760 millions d’euros qui lui sont versés par Londres pour financer le matériel de surveillance et l’effort de lutte contre l’immigration clandestine.

Pour le reste, le système mis en place depuis les accords de Sangatte en 2000 et du Touquet en 2003, complétés par le traité de Sandhurst en 2018, demeure : en donnant à la France le rôle de gendarme de la frontière britannique, Londres reste maître du processus, même s’il est mieux aménagé par ce nouvel accord.

L’Union européenne (UE), qui a pourtant mis en œuvre une logique similaire en sous-traitant à la Turquie la gestion des flux migratoires vers l’Europe, préfère éviter de se charger du problème, alors que, depuis le Brexit, la Manche est devenue une frontière extérieure de l’UE. M. Macron a cependant annoncé que 26 garde-côtes de l’agence européenne Frontex seront déployés sur le littoral français. La gestion des personnes renvoyées par Londres restera malgré tout un problème européen, puisque, en application du règlement de Dublin, la France pourra les renvoyer dans le pays de l’UE où elles ont posé le pied à leur arrivée sur le continent, en dépit des réticences des pays méditerranéens.

Avec le renvoi des déboutés vers le continent, M. Starmer espère contrer l’extrême droite de Nigel Farage. M. Macron ne s’est d’ailleurs pas privé de souligner, à juste titre, l’échec et les « mensonges » du Brexit, en particulier celui du contrôle de l’immigration clandestine. Une petite satisfaction qui ne masque pas le doute sur les chances de ce nouvel accord de dissuader les traversées mortifères de la Manche.

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