On pourrait imaginer la fille de Charlotte Perriand alanguie dans la célèbre chaise longue dessinée par sa mère en 1928, bercée par le flot continu des royalties. Mais c’est une femme affairée qui reçoit dans l’ancien atelier parisien de la designer, devenu, après la mort de celle-ci, en 1999, son bureau. Pernette Perriand-Barsac, 80 ans, regard bleu vif, cheveux courts et baskets immaculées, dégage une certaine autorité.
Derrière elle, la dépassant d’une tête, son mari et compagnon de travail, Jacques Barsac, 73 ans, volubile et aimable. Par pure modestie, il se présente comme le « grouillot » de leur petite entreprise informelle, vouée au patrimoine de Charlotte Perriand. Auteur d’une dizaine d’ouvrages sur son œuvre, dont un catalogue raisonné en quatre volumes (Norma, 2015, 2017, 2019), Jacques Barsac est un bourreau de travail. Et le meilleur connaisseur de « Charlotte », comme sa femme et lui l’appellent familièrement.
Dans le milieu du design, ils sont « Pernette et Jacques », connus pour leur détermination. Depuis vingt ans, ces ayants droit ultra-sollicités gèrent de main de maître la postérité de leur mère et belle-mère. Rien de ce qui se dit, s’écrit ou se produit sur Charlotte Perriand n’échappe à leur œil. « Ils contrôlent », témoigne un salarié de la Fondation Louis Vuitton qui les a vus au travail lors de la grande rétrospective « Le Nouveau Monde de Charlotte Perriand » (dont Jacques Barsac était cocommissaire), en 2019.