Le pas léger, silencieuse, attentive à son ombre qui jamais ne doit la devancer, Françoise Serre Collet scrute les ronciers en lisière de bois. Au cœur de cette végétation touffue, elle peut repérer quelques centimètres carrés d’écailles. « Mon cerveau est entraîné à trouver les serpents comme l’est celui de l’ornithologue, pour quelques plumes dans l’arbre », assure-t-elle, quadrillant un espace naturel sensible proche de Milly-la-Forêt, à La Ferté-Alais (Essonne). Voilà des décennies que Françoise Serre Collet s’exerce, quarante-trois ans précisément. L’herpétologue du Muséum national d’histoire naturelle, à la retraite depuis peu, photographie amphibiens et reptiles, afin de redorer leur image auprès du grand public.
En tenue de randonneuse déterminée, un gros appareil photo prolongeant son bras droit, la sexagénaire bat la campagne, ce matin de printemps, saison qu’elle affectionne moins pour l’éclosion des primevères que pour l’accouplement des serpents. « Les mâles, se réjouit-elle, sont sortis d’hibernation depuis mars. Ils cherchent des femelles. » Sous une chaleur déjà écrasante, elle ralentit devant une mare d’où s’échappent des coassements – « Salut les copines ! » –, avant d’imiter à la perfection « ces grenouilles vertes du genre rieuses ». Plus loin, dans les fourrés, un couple de coronelles lisses (des petites couleuvres) échappe à son objectif : « Zut ! Ce n’est pas un métier facile… Il faut de la patience, on peut être frustré ! »
Deux bonnes heures s’écoulent avant qu’une vipère aspic ne montre son museau retroussé. « C’est un petit mâle, observe la naturaliste. Il a une coloration très contrastée. Vous avez remarqué qu’il ne cherche absolument pas à m’attaquer ? Il veut ficher le camp ! »