Laissons un instant les disputes historiographiques, les théories des archéologues et les hésitations des érudits, et offrons-nous un petit détour par le monde de la fantasy. Là, nulle place pour les conditionnels. La liberté de l’auteur est totale, il n’a même pas à se préoccuper de la vraisemblance ou de la chronologie. L’anachronisme est autorisé – mieux, il est encouragé s’il permet de pimenter l’intrigue. La seule loi qui vaille, c’est celle de l’imagination. Du moment que le public suit.
De ce côté-là, l’Américain George R. R. Martin, auteur de la saga du Trône de fer, n’a aucun souci à se faire. Les millions de lecteurs des cinq premiers tomes de son roman monstre attendent sagement, depuis plusieurs années, la publication du sixième volume, tandis que l’adaptation qui en a été faite à l’écran, Game of Thrones, reste considérée comme une des réussites les plus spectaculaires du genre.
L’univers imaginé par Martin se déploie sur deux continents séparés par un bras de mer. D’un côté, les sept royaumes de Westeros, qui ressemblent fortement à l’Angleterre médiévale. Au nord de cet espace agité par une terrible guerre civile, un mur gigantesque a été bâti pour séparer le monde civilisé des « sauvageons » qui vivent au-delà, dans un monde primitif et glacé, bercé par le fantastique et les rites magiques, mais en totale liberté. On peut y voir une version hyperbolique du mur d’Hadrien, qui fit pendant des siècles fonction de frontière entre l’Angleterre et l’Ecosse.
De l’autre côté de la mer, sur le continent d’Essos, la situation est tout autre : le pouvoir est réparti entre diverses cités-Etats aux mains de riches oligarchies marchandes, enfermées derrière de hauts murs. Entre elles, l’immensité de la grande plaine désertique appartient à un peuple de cavaliers nomades, les Dothrakis, qui inspirent un mélange de fascination et de terreur.