En France, une odeur ne saurait bénéficier du droit d’auteur. Aux États-Unis, au contraire, elle est protégée par le code de la propriété intellectuelle au même titre que le nom de la marque ou son logo. Encore faut-il que celle-ci soit suffisamment caractéristique et donc reconnaissable. En mai 2018, la pâte à modeler Play-Doh (groupe Hasbro) a ainsi été déposée sur la base de la description suivante : « Douce, légèrement musquée. Proche de la vanille. Des notes de cerise. Odeur naturelle d’une pâte à pain salée. » Un profil olfactif unique qui a fini par s’imposer dans la mémoire collective comme la signature de la pâte à modeler en général. Le fait est que si la Play-Doh, créée en 1956 par un certain Noah McVicker, a tellement imprimé nos mémoires, c’est aussi en raison de ses effluves gourmands qui donnaient furieusement envie de croquer dedans.
« En langage de parfumeur, la pâte à modeler sent l’héliotropine et la vanilline. Traduction pour les profanes : la Danette à la vanille mariée à l’amande douce de la colle Cléopâtre », explique Amélie Bourgeois, parfumeuse et cofondatrice du studio Flair. Il faudrait d’ailleurs se demander pourquoi les jouets dont on se souvient avec le plus d’émotion développent un parfum biscuité, à l’image des poupées Corolle. L’odeur de la pâte à modeler est si persistante, si rémanente, qu’elle continue d’exister même si l’objet a été malaxé par toute la fratrie et les cousins. « On ne m’offrait jamais ce genre de jouet, alors je profitais des moments où je devais garder mon petit frère, Pierre, pour m’en délecter jusqu’à l’ivresse », se souvient Amélie Bourgeois avec émotion.