A 4 heures du matin, jeudi 31 juillet, Robert Wilson est mort, à Water Mill (Etat de New York), entouré de ses proches. Il avait 83 ans et était atteint d’un cancer. Quand il a su qu’il lui restait deux mois à vivre, il a décidé de les passer à travailler, jusqu’au bout, dans ce centre unique qu’il avait créé en 1992 et où se retrouvaient chaque été des gens de toutes origines sociales et culturelles venus du monde entier pour apprendre et expérimenter sous l’œil du Maître. C’était un artiste sans égal. « Il a bouleversé l’art de la scène. On ne regarde plus après Bob Wilson comme on regardait avant », dit aujourd’hui Jack Lang, qui l’a fait découvrir en France avec Le Regard du sourd, en avril 1971, alors qu’il dirigeait le festival de Nancy.
Deux mois plus tard, le spectacle était présenté au Théâtre de la Musique (l’actuelle Gaîté-Lyrique). Après l’avoir vu, Louis Aragon a écrit une lettre à son ami André Breton, qui depuis longtemps avait rejoint le ciel surréaliste. Dans cette longue lettre, publiée dans Les Lettres françaises, il se rappelle, bouleversé, deux promenades qu’ils firent ensemble, très jeunes, dans les années 1910. L’une, aux Tuileries, où Breton lui avait dit : « Si jamais nous cessions de croire au miracle… » L’autre, un jour calme, dans le square à côté de la Gaîté-Lyrique, justement : « Ecoute le silence », lui avait cette fois dit son ami.