Une impression de « trop-plein » s’impose à la découverte de l’Eyjafjallajökull, dans le sud de l’Islande. Trop beau pour être vrai, ce volcan est trop grand pour que l’on puisse en faire le tour en une journée, trop sauvage pour ne pas inquiéter ceux qui s’attaquent à ses pentes verdoyantes ou bleutées, trop parfait pour le photographe qui s’aventure à en saisir l’identité.
Juuso Westerlund s’est rendu sur place en juin. Il raconte avoir écarquillé les yeux devant les paysages de carte postale qui s’offraient à lui, mesurant la difficulté qu’il aurait à trouver une représentation originale d’un sujet rebattu. Ne manquaient que le timbre et le cachet de la poste pour faire foi.
Les hordes de touristes qui convergent là-bas chaque jour s’inscrivent malgré elles dans une mise en abyme. « Brandissant leurs smartphones de manière dérisoire dans des espaces époustouflants et démesurément vastes, ces milliers de fourmis fabriquent leurs propres cartes postales en prenant en photo des cartes postales, c’est vertigineux », estime le photographe finlandais de 50 ans. Décontenancé, il a donc décidé de suivre ces grappes humaines le long des chemins ultra-balisés qui sillonnent l’imposant massif. Ces dernières arrivent toutes dans des véhicules SUV de couleur blanche loués à l’aéroport de Reykjavik, « comme des robots ». Elles se déplacent de spot de selfies en spot de selfies, sans jamais s’écarter des sentiers battus.
« Insupportable » pour le photographe de renommée internationale, diplômé de l’université des arts et du design d’Helsinki et membre du collectif Moment Agency, dont l’objet est de saisir la réalité quotidienne des pays scandinaves, dans une approche documentaire. Attiré par les pistes secondaires amenant à traverser des rivières ou à passer sous des chutes d’eau démentiellement hautes, Juuso Westerlund apprécie, au moins, que le temps ne lui soit pas compté. En été, le soleil se lève à 4 heures du matin et se couche à 23 heures.