La pâte de citron, or noir d’Iran

Une cuillerée noire, lustrée comme un grain de café, exhale un parfum de cèdre et fait lever un sourcil. Goûter L’Or noir de Maison Boteh pour la première fois a quelque chose de déconcertant. A mesure qu’il gagne le palais, ce condiment aux reflets pétrole brouille les pistes. A l’aveugle, on devine le citron, mais par la porte de côté : l’acidité, moins frontale, cède à une amertume tenue. Ou bien est-ce ce boisé-fumé, de plus en plus présent, qui installe cette profondeur ?

« On a l’impression d’importer un goût nouveau : les gens ne connaissent pas cette association de saveurs et ça les intrigue », sourit Aindiché Azadharf, qui a l’habitude de le faire déguster dans les salons. Le trentenaire est cofondateur – avec sa mère, Nasrin – de Boteh, une manufacture parisienne qui met en pot des condiments inspirés des saveurs d’Iran.

L’histoire de L’Or noir commence au domicile familial. Un jour, un colis d’épices envoyé depuis l’Iran par une grand-mère d’Aindiché s’ouvre sur une poignée de limes séchées – des citrons noirs, ces fameux loomi très utilisés en cuisine persane. Après quelques semaines d’essais, mère et fils ont l’idée de créer une pâte avec ce citron au goût si prononcé.

Le secret tient au geste et au terroir. Traditionnellement fabriqués dans la province du F?rs, au sud de l’Iran, les fruits sont plongés cinq minutes dans de l’eau bouillante salée, rafraîchis, puis enfouis plusieurs semaines. Il n’y a pas de fumage : c’est la terre qui fait le travail, entre chaleur diurne et fraîcheur nocturne. Le fruit se déshydrate, concentre ses huiles… et prend cette couleur de nuit. Dans la cuisine iranienne, on glisse habituellement le citron séché entier dans les ragoûts – comme le ghormeh sabzi – pour les parfumer.

A Paris, Boteh transforme ce fruit nocturne en pâte. Les citrons noirs macèrent deux à trois jours pour en extraire l’essence aromatique, puis passent au broyage fin afin d’obtenir une pâte lisse, sans éclats d’écorce. Un rien de sucre vient dompter l’amertume. Comment l’apprivoiser ? Pensez base à diluer. Dans un ragoût, une sauce courte ou un jus de viande, l’Or noir agit comme une pâte de curry persane, donne du relief et n’écrase rien.

La version express, addictive, tient en trois gestes : yaourt grec, une cuillerée à café d’Or noir, un filet de miel. A l’apéritif, une touche sur un toast – façon tapenade persane – suffit. Avec du beurre baratté, c’est redoutable ; sur un poisson bleu, des légumes racines rôtis, voire un chocolat noir, le condiment fait chanter le plat. Pour guider les curieux, la maison décline aussi le citron noir en sirop (plus doux) et en poudre sablée (plus directe). Dans tous les cas, une dose homéopathique suffit pour que la magie opère.

Le produit L’Or noir, pâte de citron noir d’Iran, Maison Boteh, pot de 120 g, 25 €.

Lieu de production Entre la province du F?rs, en Iran, et Paris, 20e arrondissement.

Sa fonction Condiment, exhausteur de goût, pâte à tartiner.

A déguster Seul, sur le bord de l’assiette, mélangé à de la matière grasse (beurre, crème, yaourt) ou délayé dans une préparation mijotée.

Recomendar A Un Amigo
  • gplus
  • pinterest
Commentarios
No hay comentarios por el momento

Tu comentario