Dans une saison printemps-été 2026 riche en bouleversements, quelques marques parisiennes font de la résistance. Leurs codes sont établis ; leur fondateur ou directeur artistique sont en place depuis au moins dix ans ; leur défi est similaire : parvenir à se réinventer de l’intérieur pour ne perdre ni en fraîcheur ni en pertinence.
Chez Balmain, Olivier Rousteing donne rendez-vous dans les salons feutrés de l’Hôtel Intercontinental, là où son premier défilé pour la griffe avait été donné un soir de septembre 2011 : « J’avais 24 ans, et j’étais alors le premier designer noir nommé à la tête d’une maison de luxe. On me percevait comme disruptif, un peu rebelle, se souvient-il en coulisses. Aujourd’hui, à 40 ans, je suis devenu un vétéran et j’en suis fier. J’aime la stabilité, bâtir un ADN dans la durée. » Tandis que Balmain fête son 80e anniversaire cette année, le designer a pourtant déjà eu diverses périodes : rock, pop, couture tradi, etc.
Cette fois, Olivier Rousteing amorce une échappée sur la plage, moins Ibiza enfiévrée que séance méditative. Les drapés maison s’illustrent dans des combinaisons safran, les coupes larges, des sarouels vert-de-gris noués d’une corde. Les robes bustier en tissu-éponge imitent des serviettes qui enveloppent le torse ; les robes en crochet, couleur ocre ou sable fin, font onduler de longues pampilles ; les coquillages composent des robes courtes, se superposent en sautoirs qui couvrent la poitrine ou ornent des sandales. Cette collection bohème, peu inventive, offre néanmoins une souplesse dont les clientes guindées au premier rang pourront bénéficier. « Aujourd’hui, je ne cherche plus à faire du bruit, mais à continuer ma route dans la sérénité », affirme Olivier Rousteing.
« Tous les changements de designers cette saison m’ont fait réfléchir à mon rôle chez Rabanne, explique Julien Dossena, en poste dans la maison depuis 2013. Quelque part, cela m’a radicalisé : je me suis dit que ce qui caractérise la marque, c’est la liberté d’expérimenter sans limite. » Et donc, cette saison, le Français de 43 ans s’en donne à cœur joie. Il s’est plongé dans l’histoire des maillots de bain, en particulier ceux des années 1950, « très couture », qui étaient plutôt destinés à parader qu’à se baigner. « J’avais envie d’exploser la féminité un peu cartoonesque de cette époque », résume-t-il.
Les hauts de bikini coniques s’extirpent de tee-shirts pourvus d’un grand trou en leur centre, les jupes sages ont des ouvertures latérales dégagées sur un jupon fleuri, les robes bustier sont taillées dans du Néoprène rehaussé de fleurs métalliques. Tous les archétypes vestimentaires sont bousculés par un travail de la coupe ou le choix de la matière. L’exemple le plus magistral de cette recherche expérimentale parfois extrême est une jupette dorée en morceaux de métal compressé qui fait penser à un cimetière automobile. « Cette vague de nouveaux designers me libère des questions que je me posais sur la finalité de mon travail », s’enthousiasme Julien Dossena. Qui, douze ans après sa prise de fonctions, a toujours les idées fraîches.