Une des conséquences les plus inattendues de la condamnation de Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement libyen a été de revaloriser une compétence qu’on croyait disparue : la lecture d’un document de 380 pages. Alors que le dernier rapport du Centre national du livre (CNL) constatait que le nombre de lecteurs réguliers était au plus bas depuis dix ans, un texte, fruit du travail de trois juges, sans recherche de style ni références à leur mère, pourtant le must de la rentrée littéraire, s’impose comme la lecture du moment.
Envoyé aux parties prenantes du dossier et aux journalistes accrédités au procès, le document a circulé entre avocats, avant d’être diffusé par le média d’actualité en ligne Les Jours et par la plateforme d’information Blast. L’avocat Valentin Simonnet, qui l’a lui aussi mis à disposition sur son site, nous explique l’avoir fait « pour que le débat porte sur l’objet réel, pas sur des fragments. Pour que la critique s’appuie sur une matière solide. Parce qu’il est dangereux de laisser circuler uniquement des morceaux choisis, tronqués, instrumentalisés. Parce qu’on ne construit pas la confiance dans l’institution sur des coupures de presse ».
Y avoir eu accès dans les premiers jours s’avère un marqueur plus chic que d’avoir reçu le dernier Emmanuel Carrère en avant-première. L’avoir lu intégralement relève d’une exigence particulièrement remarquable, à une époque où l’on peut avoir accès aux articles « On a lu pour vous » d’hebdomadaires, où l’on peut demander à une IA d’en faire un résumé ou encore opérer un survol rapide du document, à coups de « ctrl + F », sur les patronymes-clés de l’affaire.