Une cour d’appel a estimé, lundi 20 octobre, que Donald Trump avait le pouvoir de déployer la garde nationale à Portland (Oregon), ville démocrate dans l’ouest des Etats-Unis. Elle a jugé « qu’il est probable que le président a exercé légalement son autorité statutaire » en envoyant des soldats de ce corps de réserve de l’armée.
Le temps que l’affaire soit jugée sur le fond, elle est ainsi revenue sur la décision d’une juge de première instance qui avait bloqué ce déploiement dans cette ville d’Oregon que le président avait décrit comme « ravagée par la guerre », une analyse totalement rejetée par les autorités locales.
Dans sa décision rendue lundi, deux des trois juges de la cour d’appel ont estimé que M. Trump était bien dans son droit. Mais, non pas parce qu’il y aurait une rébellion, mais parce que le président peut faire appel à la garde nationale lorsqu’il « est incapable avec les forces régulières d’exécuter les lois des Etats-Unis ». Ce cadre s’appliquerait donc selon eux aux événements autour du bâtiment de la police de l’immigration (ICE) à Portland, où les manifestants interfèrent avec le travail de la police de l’immigration.
Le président républicain avait annoncé fin septembre son intention d’envoyer 200 soldats dans la ville. Une mesure très controversée, déjà mise en œuvre à Los Angeles, Washington, Memphis et que son administration tente également d’utiliser à Chicago.
A Portland, de nombreuses manifestations ont eu lieu ces derniers mois pour contester la politique migratoire du président, notamment autour d’un bâtiment de l’ICE. Lors de ces événements, certains manifestants sont déguisés en licorne ou en grenouille et les forces de l’ordre ont parfois utilisé du gaz lacrymogène pour disperser la foule.
Ces troubles sont considérés comme largement gérables par les forces de l’ordre locales, selon la gouverneure de l’Oregon, Tina Kotek, qui exerce une autorité conjointe avec le président sur la garde nationale de son Etat et n’a jamais jugé nécessaire de recourir à ces soldats. « Ces actions pour déployer des troupes constituent un abus de pouvoir grossier et contraire aux valeurs américaines », a réagi la démocrate lundi dans un communiqué.
Début octobre, elle avait dénoncé l’envoi de troupes argant « Il n’y a pas d’insurrection, il n’y a pas de menace pour la sécurité nationale, et il n’y a pas besoin de troupes militaires dans notre grande ville ». Une vision partagée par une juge qui avait initialement donné raison aux autorités locales en bloquant temporairement l’envoi des troupes car il n’y avait pas de « danger de rébellion ».
La troisième juge de la cour d’appel, Susan Graber, a contesté « avec véhémence » cette décision d’autoriser le déploiement de la garde nationale et a mis en garde contre un jugement dangereux pour l’ensemble des Etats-Unis.
Soulignant l’incongruité de considérer Portland comme une « zone de guerre » lorsque des manifestants portent « des costumes de poulet ». Elle a jugé que « la décision d’aujourd’hui n’est pas simplement absurde, Elle érode des principes constitutionnels fondamentaux ». A savoir, « le contrôle souverain des Etats sur leurs milices et les droits du Premier Amendement des citoyens à se rassembler et à s’opposer aux politiques et actions du gouvernement. »
De son côté, le procureur général de l’Oregon, Dan Rayfield, a réclamé que la cour réexamine sa décision lors d’une nouvelle audience, avec davantage de juges pour statuer. « La décision d’aujourd’hui, si elle est maintenue, donnerait au président le pouvoir unilatéral de déployer des soldats de l’Oregon dans nos rues avec presque aucune justification », a-t-il estimé dans un communiqué, « Nous sommes sur une voie dangereuse en Amérique. »