Prix d’interprétation féminine pour Nadia Melliti, Queer Palm… Avec La Petite Dernière, Hafsia Herzi a montré, en mai, lors du Festival de Cannes, où le film était présenté en compétition, qu’elle avait tout d’une grande. Avec ce troisième long-métrage pour le cinéma, la réalisatrice confirme, en effet, son talent pour imprimer le maximum de vie sur la pellicule. Ce, même en s’attaquant à un matériau littéraire, ici le livre éponyme de Fatima Daas, publié en 2020 (éditions Noir sur Blanc), monologue d’une jeune musulmane pratiquante qui vit avec culpabilité son homosexualité.
Cette singularité du cinéma d’Hafsia Herzi tient à quelques détails qui font, encore une fois, la force de cette Petite Dernière : une délicatesse extrême dans le regard qu’elle porte sur chacun de ses personnages, même secondaires, et sur la manière dont ils s’expriment, avec cette pudeur que l’on retrouve aussi dans son jeu d’actrice ; une mise en scène vive, pour beaucoup caméra à l’épaule, au plus près des corps qui dégage autant de sensualité que de douceur ; un mélange d’acteurs professionnels et non-professionnels dont elle obtient le plus grand naturel ; une frontalité dans la façon d’aborder ses sujets qui passe par une crudité de la langue plus que des images ; une manière de faire durer les scènes, souvent inscrites dans l’ordinaire du quotidien, pour qu’elles ne se limitent jamais à quelque chose de purement fonctionnel… Tout ici semble d’abord exister pour soi-même, dans une forme d’authenticité poétique comme arrachée au réel.