Chine : la quête de toute-puissance de Xi Jinping

Les purges sont brutales et n’épargnent personne. A la veille du plénum du Comité central du Parti communiste chinois, qui s’est tenu du 20 au 23 octobre, neuf des plus hauts généraux du pays sont tombés, visés par des enquêtes pour corruption. Parmi eux, le numéro deux de l’armée chinoise, si on met à part son chef suprême, Xi Jinping. He Weidong, 68 ans, devait pourtant en partie son ascension au fait d’avoir servi au Fujian face à Taïwan quand M. Xi était aux responsabilités dans cette province. Il avait été promu parmi les 24 membres du Politburo pas plus tard qu’en 2022, et évidemment par ce dernier.

Ont également été écartés l’amiral Miao Hua, chargé jusqu’en 2024 de tout le travail politique, c’est-à-dire de la loyauté et du recrutement au sein de la plus grande armée du monde, ainsi que Lin Xiangyang, responsable en tant que commandant du théâtre oriental des opérations et des préparatifs en cas de guerre contre Taïwan, l’île présentée pourtant comme un objectif absolu de Pékin.

Si l’armée chinoise apparaît ainsi gangrenée jusqu’au plus haut niveau, c’est bien le président Xi Jinping qui rend ces vulnérabilités apparentes au reste du monde, moins de deux mois après une parade visant à montrer la puissance retrouvée du pays. En 2024, la Chine avait annoncé l’arrestation de deux ministres de la défense successifs, tandis qu’en 2023 une grande campagne avait décapité la force chargée des missiles, donc aussi de la dissuasion nucléaire. Peuvent s’ajouter à cette liste un ministre des affaires étrangères disparu sans aucune explication, Qin Gang, ou plus récemment un ministre de l’agriculture…

Ces purges sans fin pourraient être vues comme un aveu de faiblesse, de la persistance de problèmes viciant le système et de l’incapacité du président, après treize ans passés à accumuler du pouvoir, à choisir les bonnes personnes, ou à mettre en place les bons mécanismes. Mais Xi Jinping ne voit pas les choses ainsi. L’étalage des purges montre au contraire sa toute-puissance, indique que sa confiance n’est jamais acquise, et que si l’armée, et donc la Chine, n’est pas jugée prête, lui, que la propagande qualifie de « noyau » du parti, y remédiera, par la méthode forte si besoin.

La « préparation » est en effet le mot-clé pour comprendre ce qui se joue. Le dirigeant chinois est convaincu que le relâchement des élites et du strict contrôle sur la société a conduit à l’effondrement de l’Union soviétique. Arrivé au pouvoir après trois décennies d’une ouverture qui a permis la modernisation de la Chine, mais dont il considère qu’elle a aussi produit ses propres maux ? corruption, idées libérales et perte de prise du parti sur l’individu ?, il se donne pour mission de corriger ce qui doit l’être.

Cette rectification, qui n’a pas de terme, est jugée indispensable par M. Xi pour que le parti puisse porter la Chine à la première place, comme il s’y est engagé. Cet objectif ne peut qu’exacerber les tensions avec les Etats-Unis, et implique donc d’être en ordre de marche. La politique tant célébrée de réformes et d’ouvertures a pris fin et laissé place à une phase de consolidation et de blindage. Le parti considère par exemple que la Chine doit « parvenir à plus d’autosuffisance et devenir plus forte sur les plans scientifique et technologique ». Car chaque choc venu de l’extérieur, comme la guerre des droits de douane lancée par l’administration Trump, conforte le dirigeant chinois dans sa conviction qu’il est important de se préparer à l’affrontement.

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