Le 6 novembre, le Sénat doit débattre d’une proposition de loi constitutionnelle visant à protéger notre démocratie contre un péril mortel, aujourd’hui bien réel : l’illibéralisme plébiscitaire.
Nous, auteurs de cette proposition et du livre [La « Révolution nationale » en 100 jours, et comment l’éviter, Gallimard, 64 pages, 3,90 euros] qui l’a inspirée, souhaitons expliquer comment l’outil démocratique du référendum peut être dévoyé et retourné contre la démocratie elle-même, et comment l’ajout d’une précision simple au texte de notre Constitution permettra d’éviter cette dérive, sans restreindre les possibilités de consultation de nos concitoyens.
Le texte qui sera débattu dans les prochains jours est très simple : il ne vise qu’à réaffirmer ce que les rédacteurs de la Constitution avaient prévu en 1958 dans son article 89, à savoir que la Constitution doit être révisée en deux temps : d’abord par un vote conforme de l’Assemblée nationale et du Sénat, puis par référendum ou par le Congrès, qui réunit les deux assemblées, à une majorité des trois cinquièmes.
En 1962, le général de Gaulle a jeté le trouble en utilisant une disposition qui a une finalité bien différente : l’article 11, pour organiser un référendum contournant le Parlement afin de faire adopter l’élection directe du président de la République. Cette voie avait alors été unanimement condamnée comme anticonstitutionnelle par le Conseil d’Etat, le Conseil constitutionnel et les deux assemblées, mais la réforme était allée à son terme, faute de voie de recours efficace contre ce coup de force institutionnel.
Après l’échec du second référendum constitutionnel de 1969 sur la base de l’article 11 et la montée en puissance du Conseil constitutionnel, la très grande majorité des juristes s’accordent aujourd’hui à considérer que la Constitution ne peut être modifiée que par l’article 89, qui, de fait, a été la seule voie de révision utilisée ces cinquante dernières années. Pourquoi, dès lors, faudrait-il réécrire dans la Constitution ce qu’elle dit déjà ?