Ma mère ne m’a jamais appris à cuisiner. C’était volontaire?: dans le contexte très patriarcal dans lequel j’ai grandi, à Islamabad, elle a passé beaucoup plus de temps en cuisine qu’elle l’aurait souhaité, et elle voulait que ma sœur et moi puissions avoir davantage de choix qu’elle, une carrière, des hautes études. A 18 ans, j’ai eu la chance d’obtenir une bourse pour aller étudier les relations internationales à Stanford University, en Californie, où j’ai déménagé seule.
Dès l’adolescence, je m’étais engagée pour diverses causes, notamment le droit des femmes. Aux Etats-Unis, je me suis très vite intéressée aux femmes entrepreneuses?: je n’en avais jamais rencontré dans mon pays. Alors que j’étais consultante chez McKinsey à Dubaï, j’ai fait la connaissance de Malala Yousafzai, une compatriote luttant pour l’éducation des filles et contre les talibans pakistanais, qui a été victime d’une tentative d’assassinat à 14 ans et sacrée Prix Nobel de la paix à 17 ans.
Son histoire m’a incroyablement inspirée, et je lui ai proposé de créer le fonds Malala, pour soutenir l’éducation des filles et la création de nouvelles écoles. Convaincue du pouvoir de chacun de changer les choses, j’ai ensuite créé une fondation pour lever des fonds pour divers projets dans ce sens. C’est aussi à ce moment-là que je me suis mise à cuisiner.
Lorsque je suis arrivée aux Etats-Unis, je n’en avais que faire de la cuisine?: je bougeais tout le temps, je mangeais dehors, sur le pouce. Mais aux abords de la trentaine, alors que j’étais expatriée depuis dix ans, j’ai commencé à me sentir hors sol, coupée de ma réalité. J’ai appris à cuisiner pour me reconnecter à moi-même, à mes racines et à mon entourage. Cela m’a permis de manger plus sainement, mais aussi de créer du lien, des amitiés, et d’exprimer mon identité.
Lorsque je cuisine, je mixe toutes les cultures qui font ma vie?: je suis pakistanaise, mon mari est perse, nous vivons en Californie, nous avons accès à de très bons produits et nous adorons recevoir. J’aime tout particulièrement organiser des brunchs, avec des buffets généreux, des fruits frais, des confitures, des œufs. Je prépare très souvent une chatchouka, un plat du Maghreb, en y ajoutant quelques twists de chez nous, de la feta émiettée, des herbes fraîches, du cumin, du chili… Je prépare la base la veille et, le jour J, j’ajoute les œufs et je mets à cuire au four directement.
Lorsque je me suis mise à cuisiner, je me suis vite rendu compte que je ne trouvais pas les bons ustensiles, toutes les marques modernes qui m’intéressaient utilisaient du Teflon, qui est toxique. Je voulais des outils sains, faciles à utiliser, multifonction. J’ai lancé la marque Our Place avec mon mari en 2019. Nous avons passé beaucoup de temps à développer les produits, à trouver les bons matériaux et les bons artisans. Mais la collection est là, alignée avec mes valeurs, et j’en suis fière.