Mayamystic n’est pas à une contradiction près. Côté pile, l’Arcachonnaise revendique 11,5 millions d’abonnés sur YouTube, une audience qui la classe parmi les cinq vidéastes français les plus suivis de la plateforme ; côté face, elle n’est « pas souvent » dérangée dans l’espace public par des fans en quête de selfies, comme le raconte au Monde sa meilleure amie. A 23 ans, celle qui s’est spécialisée dans la création de contenus en ligne autour du cosplay, une pratique qui consiste à incarner un personnage dont on porte le costume, semble naviguer sur la ligne fine qui sépare l’illustre inconnue de la superstar d’Internet. Comme pour illustrer cette ambivalence, elle ne donne au Monde que son prénom, Shana, refusant que son patronyme soit rendu public.
Et pour cause, Mayamystic ne rivalise que depuis peu avec les têtes d’affiche de YouTube. « J’ai commencé à publier mes cosplays sur la plateforme il y a deux ans seulement », se souvient celle dont les vidéos cumulent aujourd’hui quelque 5,6 milliards de vues (soit plus du double de celles du youtubeur Norman, qu’elle doublera aussi bientôt en nombre d’abonnés), comme l’avait relevé en juin le média spécialisé L’ADN. Des chiffres astronomiques et une ascension éclair, que la créatrice de contenus semble avoir elle-même du mal à se représenter, comme elle le confie au Monde : « J’y suis allée à l’aveugle, en me disant : si ça plaît, tant mieux, sinon tant pis, mais au moins je partage mon travail. »
Son travail ? Chaque jour, elle publie sur YouTube, ainsi que sur TikTok (où 4,6 millions d’internautes la suivent), des vidéos de quelques secondes dans lesquelles elle porte ses derniers costumes. Le schéma de ces Shorts – puisque c’est le nom donné par la plateforme de Google à ce format de courtes vidéos verticales, implémenté en mars 2021 – est souvent le même : sur un fond musical entraînant, on la voit d’abord habillée normalement, avant que fasse irruption une autre version d’elle-même en train d’interpréter un personnage de dessin animé, à chaque fois dans une situation originale.
Bob l’éponge, Crazy Frog, Marge Simpson, Ankha de la franchise Animal Crossing…, la garde-robe de la cosplayeuse, grande amatrice des adaptations animées de bandes dessinées franco-belges et de jeux vidéo comme Undertale et Five Nights at Freddy’s, reflète son amour pour l’esthétique cartoon sous toutes ses facettes. Après avoir travaillé un temps dans l’aide à la personne, Mayamystic a d’ailleurs tenté sa chance en école d’art, dans l’espoir de rejoindre un studio d’animation. Ce n’est pas sa seule passion : « J’ai aussi toujours aimé faire du théâtre et rêvé de jouer dans un film », raconte-t-elle. Mais la jeune femme est dysphasique, « ce qui veut dire [qu’elle a] des difficultés à [s’]exprimer » – un trouble du développement du langage oral qui douche ses envies de cinéma.