La revue des revues. En mai 2024, la petite maison d’édition Novice a publié Bienvenue en économie de guerre !, de David Baverez, dont elle a vendu 10 000 exemplaires. De fait, ni la France ni l’Union européenne ne sont aujourd’hui en guerre, mais leurs économies le sont. C’est le même raisonnement qui a conduit la revue semestrielle Regards croisés sur l’économie – dont la mission, depuis 2006, est de construire des ponts entre recherche académique et débat public – à consacrer un volume entier aux économies confrontées aux conflits. Coresponsables de ce numéro, « Entre guerre et paix. Les économies face aux conflits », Diane Amberny-Chevalier, Antonin Chenard et Aurélie Lachkar ont mobilisé une vingtaine de contributeurs, d’horizons divers.
Pour entrer dans la dimension économique des conflits, trois angles ont été privilégiés. Le premier porte sur les ruptures que la guerre provoque, notamment en raison de son coût. L’économiste Eric Monnet explique comment les conflits militaires modifient l’intervention publique, pendant leur déroulement et à leur dénouement. C’est dans le secteur financier que l’emprise de l’Etat s’intensifie pour assumer les dépenses militaires. L’économiste Mathieu Couttenier étudie les conséquences des conflits civils, qu’il qualifie de « cercles vicieux », tandis que l’historienne Laure Machu détaille les innovations industrielles, en matière de production et de gestion de la main-d’œuvre.
Le deuxième éclairage s’intéresse aux continuités entre guerre et paix. Si elle signe le retour du conflit sur le sol européen, l’invasion russe de 2022 en Ukraine « constitue aussi un retour de la guerre à haute intensité », notent les trois copilotes du numéro. De son côté, le chercheur en science politique David Rigoulet-Roze explique comment le terrorisme traduit la permanence de la menace guerrière, en temps de paix, et insiste sur ses coûts sociaux. Le militaire Paul Janin détaille les nouveaux aspects de la guerre informationnelle.