Le soleil à travers les verrières du Grand Palais, des arches couleur bonbon dans les allées grâce à une scénographie de l’enjouée Constance Guisset… tout riait déjà au salon FAB Paris, le matin du vernissage, vendredi 19 septembre. Même les décorateurs et créateurs chargés, pour la première fois de l’histoire de cet événement, d’indiquer leur coup de cœur parmi la profusion d’œuvres d’art présentées sur les 91 stands.

Jean-Charles de Castelbajac, sillonnant l’espace pendant deux heures, avait un mot pour chacun et de la curiosité pour tous. D’autres se refusaient à ne choisir qu’une pièce… Finalement, contraints et contrariés, ils ont livré leur sentence. A quatre d’entre eux, nous avons posé ces deux questions : « Pourquoi ce choix ? » et « Dans quel décor verriez-vous cet objet ? » Compte rendu circonstancié.

« Evoquant une grappe de fruits du grenadier, cette sculpture en bois datant du XVIIe, du XVIIIe ou du XIXe siècle – le doute subsiste – m’a séduite. C’est un artiste qui a choisi une racine ayant naturellement enserré une pierre et qui en a fait une sculpture (ishigami), à nouveau organique. Il a transformé une espèce de merveille de la nature en un nouvel objet, dont on ne sait pas s’il est naturel ou artificiel.

C’est une sculpture que je mettrais dans un cabinet de curiosités. J’en ai un dans mon studio, où j’emmagasine tous mes “trésors”, notamment des cailloux ou des bois flottés ramassés sur la plage. A moins que je ne socle cet ishigami sur un mur de couleur, comme s’il en sortait. Magique ! »

« Cette pièce rare des années 1930, en métal perforé nickelé et en verre, de Pierre Legrain, a immédiatement attiré mon attention. Autrefois dans la collection du comte et de la comtesse de Noailles, qui incarne pour moi l’essence du mouvement moderne, elle allie une radicalité sobre et une élégance sans compromis.

Si je le pouvais, je l’installerais bien sûr chez moi, dans le décor de boiseries du XVIIIe siècle de ma chambre ! Ce contraste, presque provocateur, me fascine. La richesse ornementale du XVIIIe siècle rendrait hommage à la pureté tendue du modernisme. Entre ces deux mondes, la console de Pierre Legrain serait un manifeste silencieux. Sur son plateau de verre, j’imagine ne poser qu’une seule céramique d’Ettore Sottsass, pour la sublimer. »

« Je m’étais occupée de la scénographie de la vente aux enchères Pierre Bergé et Yves Saint Laurent en 2009, et cet objet était l’un des clous de la collection. Cela m’a émue de le revoir. Il a une histoire chère à mon cœur : plus qu’un objet fonctionnel ou une œuvre d’art, je vois derrière des personnes importantes pour moi. Ce n’est pas un fauteuil gigantesque, mais ses yeux de dragon sur les accoudoirs ont vu plein de choses. C’est comme revoir un vieil ami.

Aujourd’hui, je l’emporterais bien chez moi. Et notamment dans une maison à la campagne, campé près d’une fenêtre donnant sur les champs. Il regarderait les blés de ses yeux écarquillés. »

« Dans ce cénacle de chefs-d’œuvre de l’histoire, il faut parier sur le futur. Je m’inquiète de savoir comment les très jeunes générations auront un appétit de ces choses, qui éveillera leur curiosité. C’est pourquoi je célèbre ceux qui font le pont entre hier et aujourd’hui, tel le jeune designer Edgar Jayet.

Sa chaise Chantilly – avec ses matériaux bruts : du cuir, du bois noir – me touche particulièrement par sa forme ancienne et en même temps résolument moderne. Je la verrais bien chez moi ou dans une maison du Sud-Ouest, avec son archéologie romane, comme les églises du pays. »

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