L’agence de notation S&P (anciennement Standard & Poor’s) a abaissé, vendredi 17 octobre, la note de la France de AA? à A+, en raison d’une incertitude « élevée » sur les finances publiques.
Moins d’une semaine après la formation du deuxième gouvernement de Sébastien Lecornu et trois jours après la publication d’un projet de loi de finances (PLF) pour 2026, la société d’analyses financières estime qu’« en l’absence de mesures supplémentaires significatives de réduction du déficit budgétaire (…) l’assainissement budgétaire sur notre horizon de prévision sera plus lent que prévu précédemment, même si l’objectif de déficit des administrations publiques de 5,4 % du PIB [produit intérieur brut] pour 2025 sera atteint ».
« Nous prévoyons que la dette publique brute atteindra 121 % du PIB du pays en 2028, contre 112 % du PIB fin 2024. En conséquence, nous avons abaissé notre notation souveraine non sollicitée de la France de “AA?/A?1+” à “A+/A?1”. La perspective est stable » , précise S&P dans un communiqué.
« Malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026, l’incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée », affirme l’agence, qui figure parmi les trois plus influentes avec Moody’s et Fitch.
Réagissant à cette deuxième dégradation par S&P en un an et demi, le ministre de l’économie, Roland Lescure, a dit « [prendre] acte » de cette décision. « Le gouvernement confirme sa détermination à tenir l’objectif de déficit de 5,4 % du PIB pour 2025 », a-t-il réagi dans un communiqué.
« Pour 2026, le gouvernement a déposé mardi 14 octobre un projet de budget qui vise à accélérer la réduction du déficit public à 4,7 % du PIB tout en préservant la croissance. Il s’agit d’une étape-clé qui nous permettra de respecter l’engagement de la France à ramener le déficit public sous 3 % du PIB en 2029 », poursuit M. Lescure. « Il est désormais de la responsabilité collective du gouvernement et du Parlement de parvenir à l’adoption d’un budget qui s’inscrit dans ce cadre, avant la fin de l’année 2025 », conclut le ministre.
Mais le gouvernement qui, à peine entré en fonctions, a échappé de peu cette semaine à la censure après une concession aux socialistes sur la réforme des retraites, va devoir composer avec une Assemblée nationale sans majorité lors de débats budgétaires qui s’annoncent houleux, alors même que le premier ministre, Sébastien Lecornu, s’est engagé à ne pas recourir à l’article 49.3 de la Constitution pour imposer son texte.
Cette nouvelle dégradation de la note de la France par S&P intervient avant une décision de Moody’s attendue le 24 octobre. Elle a lieu un mois après que l’agence Fitch a elle aussi abaissé la note française à A+.
Les agences de notation comme Fitch, Moody’s et S&P Global Ratings classent la qualité de crédit des Etats – soit leur capacité à rembourser leur dette –, de AAA (la meilleure note) à D (défaut de paiement).
Les dégradations de note par les agences sont redoutées par les pays car elles peuvent se traduire par un alourdissement des intérêts qu’ils auront à verser. Ceux payés par la France sont estimés à environ 55 milliards d’euros en 2025, alors que, depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, la dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande.
« La France traverse sa plus grave instabilité politique depuis la fondation de la Ve République en 1958 », estime S&P. « Depuis mai 2022, Emmanuel Macron a dû composer avec deux Parlements sans majorité claire et une fragmentation politique de plus en plus forte », ajoute l’agence qui juge que « l’approche de l’élection présidentielle de 2027 jette un doute (…) sur la capacité réelle du pays à parvenir à son objectif de déficit budgétaire à 3 % du PIB en 2029 ».
En tombant en A+ chez S&P, la France se retrouve au niveau de l’Espagne, du Japon, du Portugal et de la Chine.