Un peu plus de 4 kg, 570 illustrations et 584 pages grand format (24,5 cm x 31 cm). Le tout expliqué, décodé par une équipe pluridisciplinaire composée de 27 auteurs et autrices d’Occident et d’Afrique, conjuguant approche historique, rigueur scientifique et analyse critique, qui invite à (re)découvrir la richesse sculpturale africaine sous un nouvel angle.

Le beau livre Les Arts africains, édité par la maison Citadelles & Mazenod, met en lumière le pouvoir créatif du continent, des premiers siècles avant notre ère jusqu’à nos jours, sous la direction de Yaëlle Biro, coordinatrice scientifique à l’Institut national d’histoire de l’art (INHA, Paris), et de Constantin Petridis, chef de département « Rita Knox » et conservateur des arts d’Afrique à l’Art Institute of Chicago (Etats-Unis).

« Il y a trente-sept ans, l’ouvrage L’Art africain [déjà publié chez Citadelles], de Jacques Kerchache, collectionneur d’“arts premiers” et l’un des initiateurs du Musée du quai Branly-Jacques-Chirac, et Jean-Louis Paudrat, historien de l’art spécialiste de l’art africain, a été un événement. Près de vingt ans après l’ouverture du musée, c’est une nouvelle page qui s’écrit sur les arts du continent africain avec la publication de cette somme inédite », souligne Matthieu de Waresquiel, directeur général des éditions Citadelles & Mazenod.

Aujourd’hui, le pluriel a pris la place du singulier dans le titre du beau livre. Un changement qui peut sembler anodin mais qui se révèle essentiel, comme le précise Yaëlle Biro : « Couvrir la création d’une grande partie du continent africain, des formes les plus anciennes aux expressions les plus récentes, dans un même volume, est une impossibilité qui impose des choix difficiles. Annoncer dès ce titre l’étendue du sujet, la diversité des formes, des matières, des aires géographiques comme temporelles est une nécessité. »

Trois grands chapitres rythment l’ouvrage : recomposer l’histoire par l’objet, avec les fragments du passé, l’Afrique comme zone de contact et le tournant du XXe siècle ; façonner le regard vers l’objet, de l’Afrique de l’Ouest à l’Afrique australe en passant par l’Afrique centrale ; et enfin penser le contemporain par l’objet, lorsque les artistes du continent dialoguent avec le passé.

La sélection des auteurs et autrices imposait bien sûr des spécialistes dans leur domaine, permettant ainsi des perspectives croisées et complémentaires, européennes, américaines et africaines, et appartenant à différentes générations. Quatre disciplines sont notamment représentées : l’histoire de l’art, l’archéologie, l’anthropologie et l’histoire. Et afin d’enrichir le propos, certaines contributions ont été écrites à quatre mains.

Pour Constantin Petridis, « ces parcours biographiques et académiques, ainsi que les différentes professions exercées par nos auteurs, professionnels de musées ou d’institutions de recherche ou d’enseignement, se reflètent » dans les écrits, voulus accessibles aux non-spécialistes et apportant une dimension historique, comme un état des lieux de la connaissance et des enjeux actuels concernant les arts africains.

La magnificence de l’ouvrage est portée par la richesse de l’iconographie, avec un soin particulier apporté à la mise en page entre textes et images, afin de refléter la diversité matérielle, typologique et stylistique des arts du continent. « Sans ignorer les grands classiques, le lecteur rencontrera un grand nombre d’objets plus confidentiels, moins connus du grand public. Nous avons privilégié les collections publiques d’institutions muséales, dont certaines sont situées en Afrique : Bénin, Nigeria, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Afrique du Sud ou encore Zimbabwe », énonce Constantin Petridis.

Cette quête des illustrations fut un défi afin de trouver une répartition équilibrée entre les différents chapitres. Des compromis ont été nécessaires, notamment eu égard aux critères de qualité, de localisation et d’acquisition des photographies.

Alors comment peut-on appeler ces objets ? « Anciens », « premiers », « classiques » ? La question est abordée dans le texte écrit par Susan Elizabeth Gagliardi, professeure en histoire de l’art à l’Emory University d’Atlanta (Etats-Unis) : « Durant des décennies, les passionnés d’art africain, y compris les conservateurs et autres spécialistes, ont fait la distinction entre les pratiques créatives “traditionnelles” et “contemporaines” du continent, sans pour autant s’accorder sur l’adoption d’une terminologie ou d’une définition adéquate. »

Les opinions divergent entre, d’un côté, collectionneurs et amateurs d’art, et, de l’autre, membres du monde académique et professionnels de musées. Constantin Petridis précise que, dans le monde anglophone surtout, on évite les termes « premiers » ou « anciens », que l’on considère presque aussi péjoratifs ou discriminatoires qu’« arts primitifs » ou « arts tribaux », « en vogue dans un passé pas si lointain ».

« Nous avons choisi d’utiliser les expressions “arts traditionnels” ou “basés sur la tradition”, qui, malgré leurs imperfections, aident à distinguer ces arts qui sont fonctionnels dans le sens le plus large, totalement intégrés dans la vie des communautés et des individus qui les utilisent », souligne-t-il.

Le sous-titre de l’ouvrage, Histoire et Dynamique, dévoile également la thèse centrale de la compréhension du volume. Pour Constantin Petridis, il s’agit « d’abord de montrer et de célébrer l’histoire ancienne et l’évolution dans le temps des arts à travers le continent, afin de rejeter ou dénoncer le stéréotype d’une Afrique hors du temps. Puis d’examiner l’historiographie de l’étude et de la présentation de ces arts. (…) Et espérer surpasser les lacunes et les erreurs de nos prédécesseurs et ouvrir la voie vers de nouvelles recherches par les générations futures ».

Enfin, la pluralité représente l’une des forces du beau livre : la grande statuaire d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale y est bien sûr présente, mais aussi le textile, la céramique, la photographie… Sans oublier la diversité des regards portés sur ces créations, souvent éblouissantes voire émouvantes.

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