A l’hôpital Al-Mouassat, à l’ouest de Damas, Sara Melhem fait glisser une porte grillagée et descend par un étroit couloir. Elle pénètre dans la morgue de l’hôpital universitaire, qui reçoit tous les corps de la banlieue de la capitale syrienne. Son supérieur, Sharif Mimas, médecin légiste à la carrure solide, rédige, imperturbable, des certificats de décès à la lueur de néons blafards.
Sara Melhem, 28 ans, détonne dans le paysage, avec ses lunettes de soleil vissées sur son voile blanc et son élégant manteau agrémenté d’une petite broche. Entre l’étudiante en dernière année de médecine légale – elle sera officiellement médecin légiste dans quelques mois, après dix ans d’étude – et l’ours aux vingt-cinq ans de carrière, les relations sont empreintes de respect.
Alors que le nouveau régime syrien vient d’organiser, le 5 octobre, les premières élections législatives – au suffrage indirect – depuis la chute du régime de Bachar Al-Assad, le 8 décembre 2024, la tâche des médecins légistes est immense : à l’identification des morts de la dictature et des quinze années de guerre civile, viennent s’ajouter les victimes des règlements de comptes qui se multiplient dans le pays, depuis l’arrivée au pouvoir des islamistes de Hayat Tahrir Al-Cham (HTC).