L’homme rajuste ses lunettes avant de se pencher sur une feuille où il a inscrit quelques phrases à l’attention de la présidente du tribunal : « Je préférerais être dans mon laboratoire, ma place n’est pas ici. » Frank Lafont est directeur de recherche au CNRS, spécialisé dans les maladies infectieuses. Le 10 octobre, il comparaissait devant la 15? chambre de la cour d’appel de Paris. En cause, sa participation avec une trentaine d’activistes du collectif Scientifiques en rébellion, le 9 avril 2022, à une conférence sauvage sur l’effondrement de la biodiversité intitulée « La nuit de l’extinction », relayée sur les réseaux sociaux.
A 18 heures, horaire de fermeture du Muséum national d’histoire naturelle à Paris, les participants avaient refusé de sortir de la galerie de paléontologie. Ils sont partis à 20 h 20, n’ont commis aucune dégradation et avaient même payé leur billet d’entrée. En première instance, le 26 septembre 2024, le tribunal les avait relaxés mais le parquet a fait appel contre les quatre prévenus.
« Nous sommes restés dans notre rôle de diffusion du consensus scientifique », s’est défendu Frank Lafont, avant d’évoquer les multiples rapports scientifiques publiés en vain, selon lui. « Les gens qui alertent ne font que leur devoir », a défendu Luc Abbadie, écologue et professeur émérite à la Sorbonne Université, appelé par la défense. Dorian Guinard, maître de conférences en droit public à l’université Grenoble-Alpes, a quant à lui estimé que « l’état de nécessité » peut être invoqué, au vu du « préjudice écologique d’ampleur à l’échelle géologique ».