Un des monuments les plus étranges de France se cache sur les hauteurs de Dreux, sous-préfecture d’Eure-et-Loir, entre Paris et la Normandie. C’est là que Louis-Philippe (1773-1850), le dernier roi à avoir régné en France, a choisi de transformer une chapelle familiale en nécropole dynastique destinée à accueillir sa dépouille, celle de ses successeurs (chassé par la révolution de février 1848, il n’en aura pas) et de ses descendants. On remarque les vitraux dessinés par Ingres et Delacroix, les ornements néogothiques imaginés par Viollet-le-Duc et surtout, dans le déambulatoire, des gisants de marbre au réalisme troublant.
Ici, un bambin au sommeil agité, un pied potelé sorti du drap, crucifix dans la main : la tombe d’une fille de Louis-Philippe, Françoise, morte à l’âge de 2 ans. Là, un explorateur se tordant de douleur, lâchant son compas, pointant sur une carte une destination qu’il n’atteindra jamais : Henri d’Orléans, un arrière-petit-fils du roi, mort du paludisme en 1901 en Cochinchine (aujourd’hui, le Vietnam).
Dans la crypte, un pot de chrysanthèmes finit de faner devant le tombeau du dernier arrivé en date, Henri d’Orléans (1933-2019), qui aurait régné sous le nom d’Henri VII si l’histoire en avait décidé autrement. Des blocs de marbre encore vierges de toute inscription sont déjà en place pour les prochains défunts.
On quitte la crypte pour remonter dans le déambulatoire et finir par localiser la tombe qu’on est venu observer. Elle n’a rien pour attirer l’attention, elle : un caveau pour deux cercueils, sans décoration. Il faut se contorsionner sur ses côtés pour découvrir, gravée dans la pierre, l’identité des occupants. A gauche, « Son Altesse Royale monseigneur le prince Emmanuel d’Orléans, prince du sang royal de France, duc de Vendôme et d’Alençon, 1872-1931 ».