Depuis le 5 août, un incendie d’une ampleur sans précédent ravage le massif des Corbières, dans l’Aude. En moins de vingt-quatre heures, plus de 17 000 hectares sont partis en fumée.
Ce feu illustre une nouvelle génération d’incendies dits « extrêmes » qui dépassent désormais les capacités humaines d’intervention. Leur intensité exceptionnelle, leur vitesse de propagation très rapide et les conditions climatiques extrêmes rendent toute extinction traditionnelle illusoire. Ce phénomène, autrefois exceptionnel, tend à devenir la norme en Méditerranée.
Les spécialistes définissent ces incendies comme des événements dont la puissance thermique dépasse 10 000 kilowatts par mètre, avec des fronts de feu se déplaçant à plus de 3 kilomètres par heure, capables de générer leurs propres vents violents et qui empêchent les pompiers d’intervenir en première ligne. Dans ce contexte, les moyens terrestres et aériens, même massifs, ne parviennent qu’à limiter les dégâts.
Depuis les années 1970, la France a mis en place une politique efficace de lutte contre les incendies qui repose sur une intervention rapide, des moyens aériens puissants et une mobilisation exceptionnelle des sapeurs-pompiers volontaires, qui constituent près de 80 % des effectifs engagés. Ce modèle s’appuie sur une attaque massive et précoce des feux naissants, parfois déclenchée dans les toutes premières minutes. Cette stratégie a permis de limiter le nombre de grands sinistres et a longtemps été citée en exemple en Europe.
Pourtant, derrière cette réussite se cache un paradoxe bien connu des scientifiques. Dans les écosystèmes méditerranéens, le feu jouait autrefois un rôle écologique essentiel. Il nettoyait les sous-bois, régulait la densité des combustibles et favorisait la régénération naturelle. En supprimant ces petits feux, on interrompt un cycle naturel qui limitait la charge inflammable. Sous l’effet du dérèglement climatique, cette masse de combustible s’accumule, sèche plus rapidement et alimente désormais des incendies d’une intensité que les dispositifs humains ne peuvent plus contenir.