Après des montagnes de livres, des heures d’émissions télévisuelles et radiophoniques, des centaines de déclarations plus distrayantes les unes que les autres de la part de nos politiques, on s’inquiétait de ce que les tribulations de l’islamo-gauchisme et du wokisme vinssent à s’éteindre.
Mais c’était sans compter notre équipe gouvernementale, qui nous fournit généreusement ces derniers jours un nouvel épisode : un couac entre le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, Philippe Baptiste, et sa ministre de tutelle, Elisabeth Borne, au sujet de quelques mots malheureux. Le premier a en effet déclaré qu’« il n’y a pas d’islamo-gauchisme à l’université » [lundi 7 juillet, sur la Chaîne parlementaire (LCP)]. Las ! Le pauvre homme s’est fait sèchement recadrer par sa cheffe, qui, le 13 juillet sur Radio J, soutint que l’islamo-gauchisme existe à l’université puisqu’il est un fait de société.
Sans me prononcer sur cet islamo-gauchisme, ce qu’il serait, d’où il viendrait, et combien de divisions il représenterait, je voudrais ici pointer l’inanité de l’argument ministériel, car il est symptomatique du traitement de l’université dans le débat public.
Celle-ci est-elle vraiment une version microcosmique du macrocosme que serait la société ? Cela tient du contresens total. Généralisé, le raisonnement semble même comique. Il y a de la géométrie algébrique à l’université, puisque des chaires et des départements y sont consacrés. Y a-t-il de la géométrie algébrique dans la société ? Non. Y existe-t-il de l’assyriologie ? Non plus. Inversement, trouve-t-on des marchands d’étui de portables ou des concours de sosie de Dalida à l’université ? Pas davantage.
L’université n’est ni un prolongement ni un reflet de la société. Elle n’est pas non plus nécessairement consacrée aux valeurs qui devraient régir la vie en société. Ainsi, elle n’est pas démocratique, car les étudiants et les enseignants-chercheurs se tiennent dans un rapport de verticalité, du simple fait de leur différent rapport au savoir.