Romancière et poète, Naomi Fontaine porte la voix du peuple innu. Vingt-cinq mille personnes recensées : la plus importante des Premières Nations au Québec, où les luttes identitaires francophones ont parfois occulté celles des minorités autochtones. Les Innu jouissent toutefois d’une visibilité réelle de nos jours, notamment à travers la notoriété de plusieurs écrivaines devenues des classiques, telles la poète Joséphine Bacon ou encore An Antane Kapesh (1926-2004), dont le fameux Je suis une maudite sauvagesse (Mémoire d’encrier) a fait date dès 1976.
Née dans la réserve d’Uashat, près de Sept-Iles, Naomi Fontaine, 38 ans, prend le relais avec force, mue par le désir d’inventer un futur pour les siens, dont son enfance urbaine l’avait éloignée. C’est cette double appartenance, parfois inconfortable, qui sous-tend l’ensemble de son œuvre : quatre romans à ce jour, qui ont reçu de nombreux prix. Leur succès, dès la parution en 2011 de Kuessipan (Mémoire d’encrier ; réédité en France par Le Serpent à plumes en 2015) alors qu’elle n’a que 24 ans, a montré que les nouvelles générations québécoises, toutes origines confondues, étaient désormais plus attentives à la présence autochtone.