Les rivalités Est-Ouest sont plus visibles que jamais au sein de l’Union européenne (UE) et de son voisinage. Les récentes élections en Roumanie, en Géorgie et en Moldavie montrent que la Russie et ses relais dépensent sans compter pour influencer les électeurs et orienter les politiques étrangères. La plupart du temps sans succès. Grâce au soutien affirmé de ses institutions et dirigeants, l’UE a réagi fermement, appuyant les acteurs pro-européens et s’opposant à la désinformation russe.
Ces résultats, bien qu’encourageants, restent limités. Si la Roumanie et la Moldavie ont élu des dirigeants pro-UE, les ambitions européennes de la Géorgie sont à l’arrêt. Reste à savoir si les nouveaux gouvernements sauront dépasser leurs désaccords ou si les futurs scrutins se transformeront en compétition entre l’UE et la Russie. L’Europe, doit parfois, pour affronter ces défis, favoriser une approche prudente.
En Hongrie et en Serbie, un soutien trop visible peut se retourner contre elle. En affichant trop ouvertement son appui aux forces pro-démocratiques, Bruxelles risque d’alimenter la propagande illibérale qui présente ces mouvements comme des « marionnettes occidentales ». Mieux vaut agir discrètement, privilégier les coulisses et une posture réactive.
Depuis les années 2010, Viktor Orban et Aleksandar Vucic ont assis leur autorité, et affirmé leur emprise sur leurs pays respectifs. Autrefois modèle post-socialiste, la Hongrie est désormais l’un des membres les plus pauvres de l’UE. La Serbie, marquée par les conflits et une transition chaotique, reste le pays candidat [à l’Union européenne] le moins démocratique des Balkans occidentaux. Tous deux promeuvent une rhétorique pro-russe et anti-UE, au nom d’une souveraineté défendue « à tout prix ».
Pourtant, ces régimes font aujourd’hui face à leur plus grave crise intérieure : l’émergence d’opposants crédibles. Les causes du mécontentement sont similaires – stagnation, inflation, corruption – et des scandales ont servi de déclencheurs : en Hongrie, une grâce présidentielle dans une affaire de pédocriminalité a favorisé la montée de Péter Magyar ; en Serbie, l’effondrement d’un chapiteau à Novi Sad a provoqué des manifestations massives. Pour la première fois depuis longtemps, ces pouvoirs vacillent.