« Le Monde des livres » vous invite à (re)lire deux classiques et découvrir trois nouveautés. Classiques, toutes les aventures d’Alice inventées par Lewis Carroll, dans une nouvelle « Pléiade » et une nouvelle traduction ; le chef-d’œuvre du philosophe britannique Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis, dans sa première traduction intégrale en français. Au rang des nouveautés, le roman de l’ultracyclisme proposé par Lola Nicolle ; le recueil d’essais de l’écrivain russe en exil Mikhaïl Chichkine, hommage aux auteurs et aux artistes qui ont résisté au Kremlin ; enfin, le lancinant roman en distiques de l’Américaine Maggie Millner.

CLASSIQUE. « Alice », de Lewis Carroll

Le poète victorien Matthew Arnold appelait Oxford « la cité des clochers rêveurs ». Peut-être les pensées buissonnières s’y accrochent-elles encore, suspendues aux flèches gothiques. En 1855, dans la bibliothèque de Christ Church College, un jeune professeur prépare ses cours : Charles Dodgson (1832-1898), mathématicien timide qui publie poèmes et contes sous le nom de Lewis Carroll. Par la fenêtre, il aperçoit les enfants du doyen Liddell : Harry, Lorina, Edith, et la petite Alice. Il ignore qu’il inventera pour elle un récit fabuleux qui fera le tour du monde.

Trente-cinq ans après l’édition de « La Pléiade » dirigée par Jean Gattégno, Alice revient en majesté : édition bilingue, illustrée, traduite par Philippe Jaworski. Y figurent Aventures d’Alice au pays des merveilles, De l’autre côté du miroir et le manuscrit originel, Aventures d’Alice sous terre, offert à Alice Liddell. Histoire troublante : Alice grandit, rapetisse, manque de se noyer, parlemente avec un bestiaire insensé ; puis, dans le miroir, saute d’une case d’échiquier à l’autre, discute avec des fleurs et des jumeaux querelleurs. Tout y est inversé, tout vacille ; pour s’en sortir, Alice a sa devise : « Let’s pretend » – faisons semblant.

Depuis la version pionnière d’Henri Bué (1869) jusqu’à celles d’André Bay, Henri Parisot, Laurent Bury ou Marie Darrieussecq (2024), chaque traducteur a affronté la vertigineuse mécanique des calembours, parodies et mots-valises. Jaworski signe une version fluide, fidèle, inventive, consciente que Carroll écrivait d’abord pour des enfants : eux seuls savent comprendre sans comprendre, et parler couramment le nonsense.

Recomendar A Un Amigo
  • gplus
  • pinterest
Commentarios
No hay comentarios por el momento

Tu comentario