Sur le parvis de la gare de Nevers, quelques passagers sortent du train en provenance de Paris. Cinq personnes sont assises près d’un pot de fleurs vert, accompagnées de chiens. A l’écart, Nathalie (son prénom a été modifié), la peau foncée par le soleil, se roule une cigarette, à côté d’un sac de courses rempli de ses affaires personnelles. Longeant un hôtel décrépi, sous le ciel gris de ce mercredi de fin juillet, elle se rend au Prado, une association qui fait office d’accueil de jour et de centre d’hébergement d’urgence pour personnes en situation de grande précarité, pour manger ce midi.
Après trois minutes de marche, elle retrouve une dizaine de personnes assises et alignées les unes à côté des autres, fumant des cigarettes roulées et buvant des bières en canette. Une voiture de police passe dans la petite ruelle parallèle à la structure. « V’la les schmitts [policiers], lance l’un des hommes assis sur le petit muret. Vite, les chiens », poursuit-il en bougeant les trois malinois allongés sur la route.
« Les flics, ils nous cassent encore plus les couilles maintenant, souffle Alexis, 21 ans, originaire de Nevers, ancien pensionnaire de l’aide sociale à l’enfance, qui comme un tiers de ce public, se retrouve à la rue à 18 ans, selon une enquête de 2019 réalisée par la Fondation pour le logement des défavorisés. Alors qu’on est déjà en train de périr ici… » Une femme aux cheveux longs à la teinture jaune, le coupe. « Tu veux dire, dépérir, ouais », rigole-t-elle en soufflant la fumée de sa cigarette.