Ils le flattent, le congratulent, saluent ses mérites, le remercient : il ne faut pas irriter le grand homme. Cet été, les Européens ont appris à « gérer » Donald Trump – obséquiosité et soumission d’abord, pour tenter de l’amadouer ensuite. Non sans quelque succès, semble-t-il. Mais la séquence laisse tout de même un arrière-goût amer, mélange d’humiliation et d’indignité. Elle pose une question de fond : jusqu’où aller pour ne pas déplaire à un homme dont la vision du monde diffère radicalement de la nôtre ?
Fin juin, à La Haye, aux Pays-Bas, lors du dernier sommet de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), les Européens, doigt sur la couture du pantalon, promettent à Trump d’augmenter substantiellement leurs dépenses militaires. Fin juillet, à Turnberry, en Ecosse, l’Union européenne (UE) se couche devant le président américain. Elle accepte l’inacceptable : 15 % de droits de douane sur les importations européennes aux Etats-Unis ; 0 % ou presque sur les produits américains vendus sur le Vieux Continent. L’Europe cède à la vision paranoïaque de Donald Trump, celle d’une Amérique grugée, appauvrie par le libre-échange avec ses « alliés » européens.
Fin août, à la Maison Blanche, unis derrière l’Ukrainien Volodymyr Zelensky, les chefs d’Etat et de gouvernement d’Allemagne, de Finlande, de France, d’Italie, les hauts représentants de l’UE et de l’OTAN, ainsi que le premier ministre britannique, défendent la cause de Kiev. Trump semble les avoir entendus : en cas d’accord de paix entre les belligérants, Washington soutiendra les garanties de sécurité que les Européens se disent prêts à fournir aux Ukrainiens.
Un même fil conducteur relie cette actualité. A chaque étape, le souci permanent des Européens est d’éviter que les Etats-Unis se désengagent de l’Ukraine. Pour aller vers une négociation avec la Russie, Zelensky a besoin du soutien continu de l’Amérique – financier et militaire. Il faut empêcher Trump de céder à la tentation du retrait. La « défaite » de Turnberry est, en partie, le produit de cette situation.