Autant qu’une boutique, c’est une maison de famille. Sur le toit-terrasse, un jardin privé avec des ruches et des pommiers donne un peu de miel et de gelée de pommes. Tout cela en plein cœur de Paris, à deux pas de l’Elysée, au 24, rue du Faubourg-Saint-Honoré. Le « 24 Faubourg », disent les initiés. Plus que dans ses usines un peu partout en France, c’est ici, dans ce magasin historique doublé d’un siège social, que bat le cœur de l’empire Hermès. Depuis 1880, six générations familiales s’y sont succédé.
Cette patiente accumulation de capital a débouché, durant l’été, sur une forme de consécration : pour la première fois, le descendant aux commandes du groupe a pris la tête du classement des 500 premières fortunes professionnelles de France établi par le magazine Challenges. Avec un patrimoine évalué à 163 milliards d’euros, Axel Dumas et sa famille dament le pion à leur rival Bernard Arnault (LVMH), qui dominait la liste depuis 2017 sans discontinuer.
Le faubourg Saint-Honoré devance désormais l’avenue Montaigne, siège de LVMH, mais tout cela reste dans un rayon de 1,5 kilomètre, dans le même 8e arrondissement. Invincible Paris. Capitale économique autant que politique. Lieu indépassable de concentration des fortunes. C’est ce qu’analysent avec finesse Jérôme Fourquet (IFOP) et Marie Gariazzo (Observatoire société & consommation) dans une note de la Fondation Jean Jaurès publiée jeudi 4 septembre.
Décrivant l’accroissement des inégalités de patrimoine et la nouvelle géographie sociale qui en est issue, ils s’attardent sur le cas singulier de Paris. Ici, écrivent-ils, l’accumulation des richesses « atteint des proportions inégalées », et les diverses fortunes « se sédimentent » inexorablement depuis des décennies, sinon des siècles. De quoi alimenter la réflexion, à six jours d’un mouvement Bloquons tout qui vise notamment à protester contre l’« injustice sociale ».