Festival du Monde 2025 : festival effervescent pour monde insaisissable

Un Monsieur Lapin survolté cavalant dans les couloirs du Monde, à la nuit tombante, à la poursuite de la une du lendemain incarnée par une comédienne tout de blanc vêtue. Cette scène pourrait résumer ce que la rédaction du Monde a tenté de raconter lors de son festival : la difficulté à saisir les contours des « mondes de demain », thème de la 11e édition, qui s’est tenue du jeudi 18 au dimanche 21 septembre au siège du journal, à Paris.

Ce Monsieur Lapin fictif était incarné par un comédien du collectif Nuit Orange, qui proposait des visites nocturnes, immersives et théâtralisées des locaux. Courir, donc, après le meilleur sujet, mais aussi, tel le lapin d’Alice au pays des merveilles, affronter une temporalité bouleversée tant par l’accélération de la circulation de l’information que par la brutalité des bascules géopolitiques, d’Ukraine au Moyen-Orient – il en fut question dans plusieurs débats.

Courir, aussi, à en perdre la tête – le débat consacré à la santé mentale fit salle comble, avec une surreprésentation aussi logique que préoccupante de représentants de la génération Z. Courir, encore, après des modèles économiques ou de gouvernance protégeant une liberté d’informer lourdement menacée (Julia Cagé, Didier Pourquery et Alain Minc formulèrent des propositions en ce sens).

Cette proposition théâtrale nocturne incarnait aussi, par sa forme, l’essence même de notre festival, qui a attiré cette édition plus de 6 000 personnes : multiplier les expériences, afin de rencontrer le public le plus diversifié possible lors de débats, visites, ateliers, dégustations, spectacles, performances, jeux… Parmi les gestes emblématiques de cette diversification des points de vue et des approches, donner plus de place aux enfants et adolescents auxquels, pour la première fois, une programmation spécifique était consacrée, avec les journalistes du Monde et ceux du magazine Phosphore, mais aussi confier à des étudiants en journalisme du CFJ la couverture du festival.

Mais l’on pouvait aussi quitter le lapin de Lewis Carroll pour le Lièvre de la fable de La Fontaine et, ce faisant, se souvenir qu’il peut être souhaitable, telle la Tortue dans ladite fable, de partir à point. Ralentir donc, pour arpenter, paisiblement, les œuvres du romancier Laurent Mauvignier, auteur de La Maison vide (Editions de Minuit, 752 pages, 25 euros, lauréat du Prix littéraire du Monde) et de la cinéaste Julia Ducournau, ou encore revisiter la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques avec Thomas Jolly.

Ralentir aussi pour déguster vins de Bordeaux ou grands crus d’huile d’olive. Ralentir encore pour échanger en petit comité avec les dizaines de journalistes des vingt-sept services qui composent Le Monde et qui, chaque année lors du festival, dévoilent leurs méthodes de travail, explicitent leurs choix, rappellent les vertus du temps long de l’enquête, les exigences de la mise en perspective.

Certains d’entre eux le firent également, en comité élargi, dans l’auditorium, lors des deux soirées du Quiz du Monde, grand jeu interactif au cours duquel on revint sur les prévisions que Le Monde avait su faire… ou pas. L’occasion, entre autres, pour Michel Guerrin de revenir avec un humour féroce sur un de nos bugs historiques : l’annonce dans le journal, en 1988, de la mort de la comédienne italienne Monica Vitti, pourtant bien vivante. L’erreur fut corrigée en deux heures, ce qui n’empêcha pas les premiers exemplaires du journal d’arriver dans les kiosques. Ce jour-là, nous avions été trop lièvres et pas assez tortues.

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