Sur la petite plage discrète de Ghedhabna, dans l’est de la Tunisie, des traces longilignes sillonnent le sable de la forêt jusqu’à la mer. « Les Africains arrivent en soirée, ils dorment dans les buissons, puis prennent le bateau pendant la nuit », explique un pêcheur.
Plusieurs habitants confirment que c’est bien au large de ce village qu’a eu lieu le deuxième naufrage le plus meurtrier de l’année dans le pays : quarante morts, dont douze enfants de moins de 5 ans, partis dans la nuit du 21 au 22 octobre, selon Walid Chtabri, porte-parole du tribunal de première instance de Mahdia.
« Autant de petits et de mères sur un bateau, c’est rare », glisse d’un ton sombre « Padre », figure de la communauté ivoirienne qui vivotent dans les champs d’oliviers de Jbeniana, près de Sfax, et qui connaissait personnellement l’un des passagers. C’est depuis les camps de fortune de cette région, où s’entassent des milliers de migrants subsahariens depuis l’été 2023, qu’aurait été organisé le convoi du 22 octobre.
Habituellement, les barques métalliques à destination de Lampedusa partent des plages de Jbeniana, en face des camps. Mais la multiplication des interceptions en mer ces derniers mois a forcé les migrants à se déplacer le long de la côte pour embarquer. La forêt de Ghedhabna se situe à une quarantaine de kilomètres au nord de Sfax.