Lea préfère que son nom ne soit pas mentionné. Cette femme de 30 ans, divorcée et mère de deux enfants, espère bientôt retrouver son emploi à la gigafactory de batteries électriques de Skelleftea, dans le nord de la Suède. Le groupe américain Lyten, qui en est devenu le nouveau propriétaire début août après la faillite du géant Northvolt, l’a contactée par e-mail pour lui demander si elle voulait revenir. Elle a accepté. Ancienne aide-soignante, Lea y a été recrutée en 2023 comme opératrice de production. Son travail était « stimulant », ses collègues venaient du monde entier, et elle touchait un bon salaire, suffisant pour lui permettre d’acheter un appartement.
Et puis les mauvaises nouvelles ont commencé à s’accumuler. « Certains de nos membres nous disaient que beaucoup de batteries finissaient à la poubelle en raison de problèmes de qualité », explique Lena Lundgren, responsable du syndicat IF Metall dans le comté de Norra Västerbotten. Des clients se plaignaient des retards de livraison. Longtemps, la direction de l’entreprise, fondée en 2015 par deux anciens de Tesla ayant levé plus de 13 milliards d’euros, a fait bonne figure : « On nous disait que tout allait bien, mais les médias affirmaient le contraire, et en général ils avaient raison », raconte Lea.
Le couperet est tombé le 12 mars : après un premier plan de restructuration annoncé à l’automne 2024, Northvolt, vitrine de la réindustrialisation verte de la Suède, mettait la clé sous la porte. A Skelleftea, commune de 77 000 habitants, le choc a été considérable : « Nous étions la ville suédoise qui avait connu la croissance la plus rapide depuis des décennies, et nous devions désormais faire face à la plus grosse faillite de l’histoire du pays », résume Kristina Sundin Jonsson, la dynamique directrice des services communaux.