Nathalie Gaspar, oncologue pédiatrique, exerce à l’institut Gustave-Roussy, à Villejuif (Val-de-Marne). Elle dirige l’unité AJA (adolescents et jeunes adultes) et le programme Spiaja (Structuration de la prise en charge interdisciplinaire des adolescents et jeunes adultes), consacré à l’amélioration de la prise en charge des adolescents et des jeunes adultes. Une population confrontée à des tumeurs hétérogènes et à des séquelles dont les conséquences se feront sentir toute leur vie.
Dès le diagnostic, on discute avec les jeunes patients de leur fertilité. On propose systématiquement aux hommes la préservation de leur sperme. En ce qui concerne les femmes, tout dépend du type de traitement. Dans la majorité des cas, on traite bien les cancers des jeunes adultes. On a un taux de survie de plus de 80 % à cinq ans. Un jeune adulte va donc potentiellement vivre longtemps avec les séquelles de son cancer, qu’elles soient liées à la chirurgie de la tumeur ou aux traitements médicaux et à leurs effets sur le corps.
Il faut donc prévoir un accompagnement qui permette au jeune de poursuivre sa formation ou son travail dans les meilleures conditions. Ce n’est pas toujours facile. A la fac, le mi-temps thérapeutique n’existe pas. Il y a juste des aménagements, mais les examens tombent à la fin de l’année pour tout le monde, et les patients ont des difficultés à accéder aux missions handicap des universités. Dans le monde du travail, le sujet reste tabou. Les jeunes n’osent pas aborder la question avec leurs employeurs. Et ces derniers ne comprennent pas que le cancer, ce sont aussi des séquelles sur le long terme, parfois invisibles mais bel et bien réelles.
Le diagnostic peut être difficile, car le cancer chez les jeunes adultes se manifeste par des symptômes souvent banals. Des douleurs qui se répètent et réveillent la nuit, une fatigue prolongée, un amaigrissement inexpliqué, des sueurs nocturnes, des fractures pathologiques, c’est-à-dire qui surviennent sur un os qui ne se casse pas facilement pour un traumatisme minime. Il faut également être attentifs aux manifestations atypiques. Une sciatique chez un jeune, par exemple, c’est rare.