Le 16 novembre, un amendement du projet de loi de financement de la Sécurité sociale proposait que « les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques ne donnent plus lieu à remboursement », en invoquant l’absence de « validation scientifique » de la Haute Autorité de santé. Il ne s’agit pas d’un ajustement ponctuel, mais de l’exclusion d’un champ théorique entier, ainsi que de toutes les pratiques susceptibles d’en être « inspirées ».
Dès lors, une première difficulté apparaît : comment définir précisément ce qui serait interdit de financement ? L’expression « se réclamant de la psychanalyse » laisse ouverte une zone d’indétermination qui affecte potentiellement une partie du soin psychique contemporain. Car au-delà de ses références explicites, la psychanalyse a contribué à diffuser des outils devenus courants : l’écoute centrée sur la personne, l’attention portée au discours, la prise en compte de l’histoire subjective, ou encore la valorisation du temps de la parole.
Ces éléments se retrouvent dans la psychiatrie, les psychothérapies intégratives, les thérapies cognitivo-comportementales, le médico-social, les pratiques institutionnelles et même la relation d’aide non spécialisée. Ce constat ne dit rien de la supériorité d’une approche sur une autre ; il montre simplement que le paysage actuel est hybride, et que tracer une frontière nette serait compliqué, voire arbitraire.
Si l’amendement s’appuie sur l’argument de scientificité, il faut rappeler ce qu’implique une démarche scientifique cohérente. Lorsqu’un champ est discuté ou insuffisamment documenté, la réponse de la science n’est pas la suppression, mais l’étude. On finance des recherches, on met en place des protocoles, on développe des méthodologies adaptées. C’est ainsi que l’on procède pour des approches nouvelles, des thérapies émergentes, des pratiques encore expérimentales. La psychanalyse – ou les pratiques qui en dérivent partiellement – ne devrait pas échapper à ce principe général. Or l’amendement ne propose aucune voie d’examen, aucune recherche, aucun dispositif d’évaluation. Il retire un moyen d’aide sans instruire le dossier.