La fille du poète controversé Ezra Pound, une inlassable défenseuse de son œuvre

Toute la journée, ils l’ont espérée. Ils ont cherché sa silhouette parmi les ombres passant devant les fenêtres du château de Brunnenburg, qui surplombe une vallée du Tyrol italien. Un bruit a couru qu’elle était trop fatiguée pour assister au banquet donné en l’honneur de son centième anniversaire.

Ce soir de début juillet, les premières bouteilles de vin circulent dans la vaste pergola à l’entrée du domaine, mais plus personne n’y croit. Quand une Fiat 500 jaune poussin s’approche des invités. Robe de la même couleur que la voiture, chevelure blanche soigneusement peignée, Mary de Rachewiltz s’en extrait et sourit aux convives. A la cantonade, elle lance : « Et Les Cantos ? Ils ont tous lu Les Cantos ? » « Vous aussi ?, dit-elle en regardant un invité, puis un autre. Et vous ? »

Les Cantos, c’est un long poème épique écrit sur plusieurs décennies, entre 1915 et 1970, par le père de Mary de Rachewiltz, l’Américain Ezra Pound, né en 1885 dans l’Idaho et mort en 1972 à Venise. Un texte fleuve, dont la dernière traduction française dirigée par Yves di Manno, parue en 2002 chez Flammarion, fait 978 pages. Ezra Pound, à l’érudition quasi infinie, y écrit en dix-sept langues (vivantes et mortes), du provençal au chinois, évoquant la philosophie, l’amour, la nature, le paganisme, l’économie, les mythes antiques…

Une œuvre sans égale, souvent absconse, qui fit dire à l’écrivain Ernest Hemingway qu’elle durera « aussi longtemps qu’il y aura de la littérature ». « Pound, c’est Dante ! », renchérit Mary de Rachewiltz, au cours d’un bref entretien au lendemain du banquet. Elle est assise dans une petite cuisine, tout en haut du château, et désigne une intégrale des Cantos. « Les gens le liront pendant des siècles et des siècles. »

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