Longtemps, la route serpente sur les versants des Cévennes méridionales. Un peu après 9 heures, on arrive enfin. La foule, déjà, commence à affluer au Mas Soubeyran (Gard), hameau dont les maisons de granit émergent au milieu d’une épaisse forêt. En famille, entre amis, parfois avec leur paroisse, des centaines de fidèles viennent participer au plus grand événement annuel de leur Eglise : l’assemblée du Désert. Depuis plus d’un siècle, les protestants français, en particulier d’obédience réformée (ou « calviniste »), convergent ici, le premier dimanche de septembre, pour un rassemblement spirituel et mémoriel.
Parmi les participants, en ce 7 septembre, beaucoup arrivent du voisinage cévenol, à la forte culture réformée, ou bien de Nîmes et de Montpellier, deux villes relativement proches où le protestantisme est bien implanté. D’autres ont fait un chemin bien plus long. C’est le cas de James Woody, pasteur parisien qui a emmené une trentaine de paroissiens. S’il a organisé cette excursion, c’est parce que le Mas Soubeyran est un « lieu mythique pour les protestants ». « Venir ici, explique-t-il, c’est l’occasion de se souvenir de notre passé. »
Caroline, accompagnée de sa mère et de ses deux fils, de 8 ans et 11 ans, lui emboîte le pas : « Mon oncle m’avait emmenée à l’assemblée du Désert quand j’avais une vingtaine d’années et, comme protestante, cela m’avait beaucoup marquée, glisse-t-elle avec un sourire. C’est pour ça que j’ai voulu y emmener mes enfants. C’est une manière de leur transmettre l’histoire de nos ancêtres. »
Les ancêtres, le passé, l’histoire : parmi les personnes présentes, beaucoup emploient ces mots pour expliquer leur venue. « La mémoire protestante est une dimension essentielle de l’assemblée du Désert », explique l’historien Patrick Cabanel, qui vient chaque année au Mas Soubeyran.