A 28 ans, Noah Lyles rejoint Usain Bolt dans l’histoire des championnats du monde. En remportant, vendredi 19 septembre à Tokyo, un quatrième titre mondial consécutif du 200 m, le sprinteur américain égale son illustre aîné jamaïcain, vainqueur sur le demi-tour de piste sans discontinuer entre 2009 et 2015.
Le Floridien (19 s 52) devance son compatriote Kenneth Bednarek (19 s 58), abonné aux médailles d’argent sur cette distance, et le Jamaïcain Bryan Levell (19 s 64). Le champion olympique en titre, Letsile Tebogo, termine au pied du podium (19 s 65).
Depuis seize ans, cette discipline a éprouvé le règne de ces deux tyrans du sprint, entrecoupé de la courte et inattendue régence d’un inconnu en 2017, le Turc Ramil Guliyev, que l’on n’a plus jamais revu sur un podium. Troisième du 100 m dimanche, en ouverture de l’édition tokyoïte, Lyles n’avait qu’une idée en tête : démontrer qu’il est bien le roi du 200 m, « son épouse légitime », comme il l’appelle dans un documentaire de Netflix consacré au sprint – dans lequel il compare la ligne droite « à sa maîtresse. »
Jeudi, lors des demi-finales, le champion avait adressé un avertissement clair à la concurrence qui rêve de le détrôner. Grâce à un chrono de 19 s 51, la demie la plus rapide de l’histoire des Mondiaux, Noah Lyles a réaffirmé son emprise sur sa course fétiche. « Le message aujourd’hui, c’est qu’ils ne peuvent pas me battre, a-t-il lancé, volontiers bravache en piste. Ne manquez pas la finale, elle sera magique. »
Le fanfaron n’en est finalement pas un, il a tenu parole. En finale, il a apposé son sceau, vengeant sa défaite en finale olympique en 2024 à Paris, où il n’avait pris que la troisième place, derrière le Botswanais Tebogo et son rival national Bednarek. Avant le départ, les cheveux teints, il a poussé un rugissement, très démonstratif comme à son habitude.
Il faut dire que depuis 2023, le spécialiste du 200 m n’avait plus qu’une obsession, triompher aussi sur la distance reine qu’est le 100 m. Pendant deux hivers, il avait enfilé le bleu de chauffe pour travailler spécifiquement son point faible – le départ –, en répétant ses gammes sur 60 m. Lors des Mondiaux 2023 de Budapest, il avait réussi son premier triplé 100 m, 200 m et 4 × 100 m. A Paris, il avait arraché pour 5 millièmes de secondes le titre sur la ligne droite devant le Jamaïcain Kishane Thompson, mais avait dû, pour cela, sacrifier celui sur le 200 m.
Avant son retour triomphal au Japon, la saison post-olympique du chef de file du sprint américain n’a pas été de tout repos. Le champion, qui n’a jamais caché ses épisodes passés de dépression, a connu des doutes et une blessure. Il n’est revenu qu’en juillet d’une interruption causée par un problème à la cheville.
Après avoir accumulé les médailles depuis 2019, il s’était interrogé sa motivation : avait-il toujours envie de gagner ? A Tokyo, il a répondu à cette question existentielle. Après les séries du 200 m, il l’affirmait sans détour : « Perdre n’est pas une option. »
Cet été, il s’était déjà montré combatif lors de son retour. Il s’était imposé lors du 200 m du meeting de Monaco, avant de battre Kenneth Bednarek, lors d’une finale explosive du championnat des Etats-Unis. Lyles avait alors toisé son adversaire du regard, tournant la tête vers lui en le dépassant. Son dauphin n’avait pas apprécié l’affront et l’avait poussé des deux mains, une fois la ligne d’arrivée franchie. « Le sport engendre de la tension et de la compétition », avait-il assumé.
Malgré la belle performance de Bryan Levell, quelques jours après les deux premières places obtenues sur 100 m grâce à Oblique Seville et Kishane Thompson, le sprint jamaïcain ne réalise pas le doublé, mais affirme son retour au premier plan.
Et les records du monde des sprints courts appartiennent toujours à Usain Bolt. Cela pourrait être l’un des derniers défis de Noah Lyles. Aller chercher le chrono mémorable (19 s 19) réussi par le Jamaïcain en finale des Mondiaux 2009, à Berlin, pour graver durablement son nom dans les annales de l’athlétisme.
L’inattendu champion du monde du 10 000 m s’est tranquillement sorti du piège des séries du 5 000 m. Vendredi 19 septembre à Tokyo, Jimmy Gressier a pris la deuxième place de sa course, en 13 min 41 s 64. Le Boulonnais est en course pour un doublé qui serait historique. L’Alsacien Yann Schrub s’est, lui aussi, qualifié, en terminant à la septième position dans la même série que Gressier.
Dans la première série, le Suédois Andreas Almgren, l’autre héros surprise du 10 000 m qu’il a achevé à la troisième place, a été éliminé prématurément. Le Français Etienne Daguinos a pris la huitième et dernière place qualificative pour la finale. Dimanche, Jimmy Gressier ne sera ainsi pas isolé en finale puisqu’il sera accompagné par ses deux coéquipiers.