Nathalie Loiseau, eurodéputée : « Après l’assassinat de Charlie Kirk, il y a des silences qui en disent plus que de longs discours »

Ces derniers jours ont été marqués d’abord par le bruit sec d’une balle, celle qui a tué, le 10 septembre, Charlie Kirk, ce jeune influenceur américain, fervent soutien de Donald Trump. Puis vint la clameur de ses partisans, choqués, à juste titre, par cet assassinat sauvage. Ils n’étaient pas les seuls à être sidérés ; nous l’étions tous de voir une fois encore la scène politique américaine endeuillée par un meurtre odieux.

Sidérée, je l’ai été aussi quand les extrêmes droites européennes, si promptes à se dire patriotes, d’ordinaire si hostiles aux signes d’une mondialisation qu’elles dénoncent, ont aussitôt milité pour que l’on rende hommage à Charlie Kirk. La surenchère est venue très vite : pourquoi ne pas lui remettre le prix Sakharov de la liberté d’opinion ?, a proposé Reconquête !. Pourquoi ne pas exiger une minute de silence en plénière du Parlement européen ?, a lancé un député suédois, soutenu illico par le Rassemblement national. Pourquoi se gêner et ne pas détourner le slogan « Je suis Charlie » ?, a osé Jordan Bardella.

Sidérée, je l’étais qu’on veuille faire de Charlie Kirk non plus une victime mais un héros, qui plus est un héros européen. Qu’on ose demander à notre Parlement de rendre hommage à un activiste qui avait glorifié la ségrégation raciale, l’esclavage, appelé les femmes à rentrer chez elles, diabolisé l’homosexualité, vomi sur l’Ukraine, reproché aux juifs de favoriser l’immigration, réclamé la peine de mort pour Joe Biden, qu’on exige des députés réunis à Strasbourg, dans l’hémicycle que présida Simone Veil, qu’ils s’inclinent à la mémoire d’un homme qui comparait l’IVG à l’holocauste du XXIe siècle.

Sidérée, je l’étais, mais silencieuse, non. J’ai répondu à cette demande des extrêmes droites, formulée avec insistance et répétée par tous leurs députés, en exposant mes arguments [le 12 septembre]. Je m’attendais à n’être qu’une voix parmi beaucoup d’autres. J’ai été la seule, sur 720 députés européens, à m’exprimer pour demander qu’on fasse la différence entre la condamnation unanime que nous devions faire face à l’assassinat d’un homme et le refus de cautionner ses idées. Aucun autre parlementaire n’a pris la peine d’exposer son point de vue. Certes, la présidente du Parlement n’a pas accordé la minute de silence exigée, sans fournir d’explication. Mais le silence de mes collègues face aux exigences de l’extrême droite a duré beaucoup plus qu’une minute.

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